Diverses sûretés peuvent être utilisées afin de garantir les obligations d’un débiteur, notamment dans le cadre d’un financement ou d’une autre transaction commerciale. Parmi celles-ci, on retrouve le cautionnement. Le cautionnement implique généralement trois acteurs clés : le créancier, le débiteur et la caution. Le rôle assumé par la caution est de garantir l’exécution de la prestation à laquelle le débiteur s’est engagé. Advenant un défaut d’exécution par le débiteur, le créancier peut exiger de la caution qu’elle lui paie ce qui lui est dû.
Le contrat de cautionnement fait l’objet de règles particulières; le législateur encadre cette forme de sûreté afin d’éviter les dérives contractuelles et ultimement de mieux protéger la caution. Voyons ce qu’il en est.
Nature du contrat de cautionnement
Le cautionnement est un contrat distinct et accessoire au contrat principal. Il s’agit d’un contrat distinct en ce qu’il encadre la relation contractuelle entre la caution et le créancier. En ce sens, le débiteur principal n’a pas à consentir au cautionnement. La loi prévoit même que la caution peut s’obliger auprès du créancier à l’insu du débiteur1.
Bien que le cautionnement soit un contrat distinct, il n’en demeure pas moins un accessoire du contrat principal. Sans le contrat principal, le cautionnement devient sans objet. Pour cette raison, l’extinction du contrat principal entraîne aussi l’extinction du cautionnement. En pareil cas, la caution est libérée de ses obligations2. Il s’agit de l’application d’un principe bien connu en droit : l’accessoire suit le principal.
Conditions de validité
Le cautionnement n’échappe pas aux règles générales applicables à tout contrat. Pour être valide, le contrat de cautionnement doit notamment faire l’objet d’un consentement libre et éclairé de la part de parties aptes et capables de contracter. Le contrat de cautionnement doit aussi, bien entendu, poursuivre des fins licites et conformes à l’ordre public.
À ces règles générales s’ajoutent deux particularités propres au cautionnement. Dans un premier temps, et tel que nous y faisions allusion plus tôt, il doit être l’accessoire d’un contrat principal valide. À défaut et sauf de rares exceptions, le cautionnement sera, lui aussi, invalide3. Dans un second temps, le contrat de cautionnement doit faire l’objet d’un consentement exprès. L’article 2335 du Code civil du Québec est clair à cet égard : « Le cautionnement ne se présume pas; il doit être exprès. »
Cette seconde règle a souvent retenu l’attention des tribunaux. La Cour d’appel a notamment eu à s’y pencher dans Lorrain c. 6989641 Canada inc.4 où elle y réitère que le cautionnement commande une expression claire et non équivoque du consentement. Dans cette affaire, la Cour a refusé d’inférer un cautionnement personnel de la part d’un représentant d’entreprise ayant signé une demande de crédit pour le compte de sa société. Le tribunal y souligne, entre autres choses, que le contrat litigieux ne faisait nulle part mention d’un engagement du signataire à remplir l’obligation de la société débitrice si celle-ci faisait défaut de s’exécuter.
Nous retenons de cet arrêt qu’un contrat de caution accessoire à un financement ne peut être conclu à l’insu du signataire. Selon la jurisprudence, le cautionnement doit faire l’objet d’une rubrique particulière ou, à tout le moins, être précédé d’un titre qui explique au signataire la nature de son engagement. Certaines décisions exigent également qu’il y ait deux endroits différents au contrat où apposer sa signature, afin de bien délimiter la teneur de chacune des obligations prévues, l’une à titre de signataire pour et au nom de la société et l’autre à titre de caution personnelle6.
Particularités du contrat de cautionnement
Certaines autres particularités propres au contrat de cautionnement méritent aussi qu’on s’y attarde. Mentionnons premièrement l’amendement du contrat principal. En second lieu, nous nous attarderons brièvement au cautionnement lié à l’exercice de fonctions particulières.
L’amendement au contrat principal
Le cautionnement étant un contrat distinct, il peut arriver que certaines modifications soient apportées en cours d’exécution au contrat principal sans que la caution ne soit consultée. Selon la teneur des modifications, le consentement de la caution peut toutefois s’avérer nécessaire. Ainsi, tout amendement au contrat principal ayant pour effet d’étendre la portée du cautionnement initial devra être porté à l’attention de la caution et, ultimement, faire l’objet de son consentement.
À cet égard, la loi prévoit que le cautionnement ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté7. Mentionnons à ce sujet que la prolongation du terme accordé par le créancier au débiteur n’a pas, en soi, pour effet d’étendre la portée du cautionnement. Dans ce cas, le consentement de la caution n’est donc pas requis8. Il en est toutefois autrement, par exemple, de l’augmentation de la limite d’une marge de crédit9. On ne peut demander à la caution de rembourser une marge de crédit s’élevant à 100 000 $, alors que le contrat de cautionnement initial porte sur une marge de crédit limitée à 50 000 $. Advenant le défaut d’obtenir le consentement de la caution en pareilles circonstances, celle-ci n’est toutefois pas libérée pour autant. Le créancier demeure en droit de lui réclamer les montants dus, mais uniquement à la hauteur de la caution consentie, soit, dans notre exemple, 50 000 $10.
Cautionnement lié à une fonction
Il s’agit du cas où la caution s’offre en garantie à titre personnel en raison des fonctions qu’elle occupe au sein d’une organisation. Pensons notamment aux dirigeants et administrateurs d’une société en quête de financement. Ce type de cautionnement est notamment visé par l’article 2363 C.c.Q, lequel prévoit qu’il prend fin au terme de l’occupation de la fonction. Autrement dit, le dirigeant d’entreprise sinataire d’un cautionnement personnel à ce titre sera partiellement libéré à la fin de son mandat. Cette libération n’est toutefois que partielle puisqu’elle ne s’applique que pour les obligations futures, la caution demeurant tenue des dettes existantes au moment de la cessation de la fonction11.
Conclusion
Il faut garder en tête cette vieille maxime juridique : Qui cautionne paie. Advenant un défaut d’exécution par le débiteur principal, le créancier peut exiger de la caution ce qui lui est dû.
Le créancier qui est partie à contrat de cautionnement et qui souhaite s’assurer de sa validité doit notamment veiller à ce que l’engagement de la caution à personnellement garantir les obligations du débiteur principal soit énoncé de façon expresse et sans équivoque. Mieux vaut être transparent avec la caution pressentie, quitte à ce que cette exigence entraîne des négociations additionnelles.
Enfin, il est dans l’intérêt de chaque partie d’être proactif dans le cadre du cautionnement. Au fil du temps, le créancier pourra ainsi s’assurer que le montant du cautionnement et l’identité de la caution correspondent toujours à ses besoins d’affaires. Quant à la caution, elle a avantage à se tenir au fait de l’exécution de l’obligation principale qu’elle cautionne. De cette façon, elle pourra mieux favoriser une prompte exécution de l’obligation par le débiteur et ainsi mitiger ses propres risques.
L’auteur aimerait remercier Charles Sans Cartier, stagiaire, pour son aide dans la préparation de cette actualité juridique.