Récemment, le gouvernement du Canada a ajouté sept groupes à la liste des entités terroristes désignées en vertu du Code criminel. Ces sept entités sont toutes des organisations criminelles transnationales qui exercent leurs activités à partir du Mexique et de l’Amérique latine et sont dotées de réseaux aux États Unis et au Canada. L’annonce fait suite à la désignation par les États Unis de plusieurs de ces entités comme organisations terroristes étrangères (Foreign Terrorist Organizations) et terroristes mondiaux spécialement désignés (Specially Designated Global Terrorists).
Ces mesures sont en lien direct avec l’engagement de 1,3 milliard de dollars pris par le gouvernement pour renforcer la sécurité à la frontière canado-américaine. Cet engagement découle de la menace du président Trump d’imposer des tarifs sur les importations en provenance du Canada en raison de préoccupations alléguées liées à la circulation du fentanyl et à l’immigration illégale du Canada vers les États Unis.
Les entreprises canadiennes qui exercent des activités dans des régions de l’Amérique latine où les entités terroristes nouvellement désignées sont actives doivent être encore plus vigilantes puisque les cartels peuvent être présents, par exemple, au sein d’organismes paragouvernementaux, contrôlant la quasi-totalité des aspects de la société locale.
Ces entreprises canadiennes devraient revoir leurs politiques et pratiques en matière de vérification diligente et de conformité, leurs chaînes d’approvisionnement et leurs partenariats et procéder aux ajustements nécessaires, s’il y a lieu.
Une désignation comme entité terroriste en vertu du Code criminel est lourde de conséquences, non seulement pour ceux directement affiliés aux entités désignées, mais aussi pour toute personne ou entité dont les agissements peuvent être perçus, même indirectement, comme un appui à un groupe désigné.
Sept organisations criminelles transnationales sont maintenant des « entités terroristes »
Les sept entités nouvellement inscrites sont toutes des cartels de la drogue basés en Amérique latine :
- Cártel del Golfo (Le Cartel du Golf)
- Cártel de Sinaloa (cartel de Sinaloa)
- La Familia Michoacana (La Familia)
- Cárteles Unidos (rassemblant plusieurs cartels affiliés)
- La Mara Salvatrucha (MS-13)
- Tren de Aragua
- Cártel de Jalisco Nueva Generación (Cartel de Jalisco Nouvelle Génération)
Le gouvernement a déclaré que cette désignation découle des activités terroristes auxquelles les organisations participent en plus du rôle qu’elles jouent dans le trafic de la drogue1.
La désignation comme entité terroriste est lourde de conséquences
En vertu du Code criminel, il est interdit de réunir ou de fournir, directement ou indirectement, des biens ou des services financiers ou connexes à des entités terroristes inscrites, dans l’intention qu’ils soient utilisés, ou en sachant qu’ils seront utilisés, pour en faire bénéficier une entité terroriste ou appuyer une activité terroriste.
Il n’y a que très peu de jurisprudence portant sur cette disposition du Code criminel. Il est donc difficile de prévoir comment elle pourrait être appliquée. Par exemple, certains juges pourraient interpréter cette disposition de façon à inclure les situations où le simple fait que des fonds risquent de se retrouver entre de mauvaises mains suffit à les rendre illégaux.
Exceptions pour aide humanitaire et autorisations ministérielles
Un nombre restreint d’exceptions s’appliquent aux personnes ou aux organisations qui accomplissent des actes « dans le seul but » de participer à des activités d’aide humanitaire, pourvu que des efforts raisonnables soient déployés pour minimiser tout avantage pour les groupes terroristes1 .
Les entités peuvent aussi demander une autorisation ministérielle pour exercer certaines activités; cependant, l’obtention d’une telle autorisation n’est pas automatique et est assujettie à une importante vérification diligente de la part du gouvernement.
Recommandations
Le gouvernement du Canada a continué à accroître et à renforcer ses lois en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, de financement antiterrorisme et de sanctions, notamment afin qu’il soit plus facile d’intenter des poursuites pour certaines de ces infractions.
En raison du risque juridique et du risque d’atteinte à la réputation, les entreprises canadiennes se doivent d’être prudentes lorsqu’elles exercent des activités dans une région où se trouve un cartel.
Les entreprises canadiennes actives dans une telle région devraient revoir leurs politiques et pratiques en matière de vérification diligente et de conformité, leurs chaînes d’approvisionnement et leurs partenariats et procéder aux ajustements nécessaires, s’il y a lieu.
Les auteurs tiennent à remercier Ian Chesney, stagiaire, pour son aide dans la préparation de la présente actualité juridique.