Lors de l’élection fédérale de 2015, le Parti libéral du Canada a présenté un programme comprenant la légalisation du cannabis à usage récréatif. Après l’élection, un groupe de travail a été créé et chargé de présenter un rapport sur la légalisation et la réglementation du cannabis, lequel a remis son rapport en novembre 2016. Le 13 avril 2017, le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois (Loi sur le cannabis) a été déposé, mettant en œuvre en grande partie les recommandations du groupe de travail. En résumé, la Loi sur le cannabis décriminalise la possession de certaines quantités de cannabis et en permet la production à des fins commerciales.
Le projet de loi établit un régime de licences et de permis applicables à la production, à la distribution et à la vente de cannabis « licite »; tout cannabis produit, distribué ou vendu autrement que de la manière permise par la Loi sur le cannabis ou une loi provinciale est considéré comme « illicite ». Voici une bonne nouvelle pour ceux qui ont investi des ressources afin de présenter des demandes de licence dans le cadre du régime relatif à la marijuana à des fins médicales (auparavant le RMFM, devenu le Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales [RACFM]) : les dispositions transitoires du projet de loi stipulent que toute licence délivrée ou toute demande en cours de traitement dans le cadre de ce régime sera réputée être une licence ou une demande en vertu de la Loi sur le cannabis lorsque celle-ci entrera en vigueur.
Le projet de loi ne mentionne pas de mécanisme de distribution. Il stipule plutôt qu’une personne peut posséder, vendre ou distribuer du cannabis si elle est autorisée à le faire en vertu d’une loi provinciale. Le projet de loi note cependant qu’une personne ne peut vendre du cannabis en vertu d’une loi provinciale que si le cannabis a été produit par une personne autorisée par la Loi sur le cannabis à produire du cannabis à des fins commerciales. Par conséquent, il faut s’attendre à de l’information complémentaire de la part des provinces au sujet du modèle de vente du cannabis.
Certains trouveront particulièrement intéressante la question de savoir si une quelconque législation provinciale autorisera ou non la distribution de cannabis à usage médical dans les pharmacies, question épineuse qui a été soulevée lorsque le règlement sur le cannabis médicinal a été présenté la première fois (à l’heure actuelle, le cannabis médicinal ne peut être distribué que par la poste). Le projet de loi propose le maintien d’un accès distinct au cannabis à des fins médicales et le RACFM demeurera en vigueur. Il reste à voir si la législation provinciale attendue prochainement touchera la distribution du cannabis à des fins médicales, et de quelle manière elle le fera.
Faits saillants du projet de loi
Licences
La Loi sur le cannabis prévoit un régime de licences et de permis autorisant la production, l’essai, l’emballage, l’étiquetage, l’expédition, la livraison, le transport, la vente, la possession ou la disposition de cannabis commercial. Bien que les détails soient régis par une réglementation qui reste à établir, il semble que le processus sera semblable à celui qui s’applique actuellement en vertu du RACFM. Les exigences auront vraisemblablement trait avant tout à l’innocuité et à la sécurité et établiront des normes de produits à l’égard du cannabis vendu.
Comme nous l’avons indiqué plus haut, le projet de loi prévoit que plusieurs types de licences et de permis déjà délivrés ou demandés en vertu d’autres lois et règlements à la date de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi seront réputés délivrés en vertu de la Loi sur le cannabis, à savoir les licences de producteur autorisé, les permis d’importation et d’exportation et les habilitations de sécurité accordés en vertu du RACFM ainsi que les licences de distributeur autorisé de stupéfiants dans le cas des distributeurs de cannabis en vertu du Règlement sur les stupéfiants.
Il est proposé que le cannabis ne puisse être importé ou exporté qu’en vertu d’une licence et qu’il puisse alors l’être uniquement à des fins médicales ou scientifiques.
Ce qui peut être vendu
Seul du cannabis produit en vertu d’une licence pourra être vendu et les produits contenant du cannabis combiné à de la nicotine, à de la caféine ou à de l’alcool seront interdits. Le gouvernement prévoit qu’au moment de l’entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis, les produits commerciaux se limiteront au cannabis frais et séché, à l’huile de cannabis, aux graines et aux plantes. Des règlements ultérieurs pourront autoriser la vente de produits comestibles et d’autres produits, mais ceux-ci ne devraient pas être mis en œuvre initialement.
Emballage et étiquetage
Les exigences applicables en matière d’emballage et d’étiquetage seront établies principalement par la réglementation qui reste à élaborer. Le projet de loi prévoit que l’emballage ne doit pas être faux ou trompeur et qu’il ne doit pas non plus être attrayant pour les jeunes, contenir des attestations ou des témoignages, représenter des personnes ou des personnages ni associer un produit à une certaine image à l’égard d’une façon de vivre.
Publicité
Le projet de loi permet la promotion informative, limitée aux renseignements factuels et exacts sur les produits de cannabis (ingrédients, niveaux de THC et de CBD, etc.). Les renseignements permettant aux consommateurs de différencier les marques seront aussi permis. La promotion n’est autorisée que là où les jeunes ne pourront l’apercevoir.
Certaines restrictions sont proposées relativement à la publicité reliée à des commandites, à des attestations et à des témoignages, au prix, à la représentation de personnes ou de personnages, à la publicité relative à une façon de vivre et à la publicité susceptible de rendre le cannabis attrayant pour les jeunes. La Loi sur le cannabis prévoit des pouvoirs de réglementation et la réglementation pourrait avoir une incidence sur ce qui sera permis ou exiger l’inclusion de renseignements précis, par exemple des renseignements concernant les risques pour la santé.
Taxe
On s’attend à ce que le gouvernement modifie la Loi sur la taxe d’accise afin de taxer le cannabis. Le rapport du groupe de travail propose la taxation du THC plus puissant à un taux plus élevé et l’affectation des recettes procurées par la vente de cannabis à des objectifs de prévention, d’éducation et de traitement relatifs aux drogues.
Prochaines étapes
Le gouvernement du Canada cible juillet 2018 pour la création d’un marché du cannabis à usage récréatif; toutefois, le projet de loi C-45 vient tout juste d’être présenté et doit être adopté par les deux chambres. De plus, plusieurs aspects du cadre réglementaire seront établis par des règlements qui doivent encore être rédigés et publiés. Il n’est donc pas garanti que le cannabis soit légalisé et réglementé et, si tel est le cas, on peut encore moins savoir quand et de quelle manière il le sera. Tant que la Loi sur le cannabis ne sera pas en vigueur, les lois existantes demeureront en vigueur et les dispositions analysées ci-dessus pourront être modifiées.