Le 30 janvier 2025, Santé Canada a annoncé qu’il accélérait la consultation sur les modifications proposées au Règlement sur les précurseurs (RP) et à l’annexe IX de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDAS). L’accélération de la consultation a été annoncée en raison des préoccupations croissantes entourant les répercussions du fentanyl et des autres drogues synthétiques illégales sur la sécurité publique. Nous présentons les aspects clés de la consultation de Santé Canada ci-après.
Cadre réglementaire applicable aux précurseurs chimiques
Les précurseurs chimiques peuvent être utilisés pour certaines activités légitimes, telles que la production de produits pharmaceutiques, de parfums, d’agents aromatisants ou d’engrais. Ces utilisations de précurseurs sont réglementées par la LRCDAS et le RP. La LRCDAS interdit l’utilisation de substances contrôlées, y compris les précurseurs de ces substances contrôlées, et le RP prévoit un cadre permettant d’autoriser des activités autrement interdites avec les précurseurs.
Dans un contexte où les précurseurs continuent d’être utilisés dans la production illégale de substances dangereuses comme le fentanyl et d’autres opioïdes synthétiques, Santé Canada révise la réglementation en vigueur afin de lutter contre les effets dévastateurs de ces drogues sur la santé publique et la société.
Modifications proposées
Santé Canada propose d’apporter cinq modifications à la LRCDAS et au RP qui auraient pour effet d’accroître la surveillance des précurseurs, d’améliorer la souplesse et l’agilité en matière de réglementation de Santé Canada et, de façon générale, de renforcer le cadre réglementaire du Canada concernant les précurseurs chimiques.
- Rendre obligatoire la déclaration des transactions douteuses à Santé Canada. Les utilisateurs autorisés et inscrits de précurseurs seraient tenus de signaler les transactions douteuses à Santé Canada. La déclaration est actuellement volontaire.
- Exiger des distributeurs autorisés et des distributeurs inscrits qu’ils vérifient le casier judiciaire et les antécédents de leur personnel clé en charge des précurseurs. Des vérifications supplémentaires du casier judiciaire et des antécédents seraient exigées afin de prévenir le détournement des précurseurs vers le marché illégal. À l’heure actuelle, seul le personnel supérieur doit consentir à une vérification du casier judiciaire.
- Restrictions relatives aux conditions de vente de l’éphédrine et de la pseudoéphédrine – deux précurseurs pouvant être utilisés pour produire de la méthamphétamine. Il serait interdit aux distributeurs de vendre des produits contenant ces précurseurs à des magasins de détail autres que des pharmacies. Il se pourrait aussi que les produits doivent être vendus derrière le comptoir et que des limites soient imposées à la quantité de précurseurs que les pharmacies peuvent vendre à des particuliers.
- Extension des exigences d’enregistrement pour les instruments désignés afin d’inclure l’importation des composants. Il pourrait être obligatoire d’obtenir une inscription en vue d’importer les composants des instruments désignés figurant à l’annexe IX pour répondre aux préoccupations liées au fait que ces instruments sont décomposés avant l’importation.
- Introduire de nouvelles flexibilités réglementaires afin que Santé Canada puisse répondre aux risques pour la santé ou la sécurité publique de manière plus agile et plus opportune. Santé Canada serait autorisé à ajouter ou à supprimer les conditions à une licence ou à un certificat d’inscription pour les précurseurs à tout moment.
Plan frontalier du Canada
La consultation sur les modifications proposées est liée au plan frontalier du Canada annoncé en décembre 2024. Le plan frontalier présente l’engagement de Santé Canada à lancer une nouvelle Unité de gestion des risques liés aux produits chimiques précurseurs qui permettrait de mieux comprendre les canaux de distribution des produits chimiques précurseurs et d’améliorer la surveillance et la vigilance. Afin de s’assurer que les organismes chargés de l’application de la loi et les services frontaliers peuvent détecter le fentanyl et ses précurseurs, le gouvernement fédéral investit également dans l’expansion des capacités de laboratoire et de réglementation de Santé Canada en prévoyant la création d’un nouveau Centre canadien de profilage des drogues qui permettra d’élargir et d’améliorer les tests de dépistage des drogues en laboratoire effectués par Santé Canada.
La portée du plan frontalier du Canada a récemment été étendue en réponse aux potentiels tarifs douaniers proposés par le gouvernement américain, notamment par la nomination d’un « tsar du fentanyl » chargé de collaborer avec ses homologues américains pour lutter contre le fentanyl. En effet, le fentanyl, en particulier la contrebande de fentanyl à la frontière canado-américaine, a été l’un des fondements expliquant les potentiels tarifs douaniers après que la Maison-Blanche a déclaré qu’il y avait au Canada une « production intérieure accrue de fentanyl » dans son feuillet d’information officiel (en anglais seulement) sur les tarifs. L’accélération de la consultation lancée par Santé Canada pourrait être liée à cette pression internationale croissante exercée pour lutter contre la production de fentanyl au Canada et la circulation alléguée de fentanyl à la frontière.
Consultation sur les modifications proposées
Le processus de consultation a commencé le 31 janvier 2025 et se poursuivra jusqu’au 3 mars 2025. Pour en savoir plus à ce sujet, notamment sur la façon de soumettre des commentaires, veuillez consulter la publication disponible ici. Si vous avez des questions sur la préparation de commentaires, veuillez communiquer avec les auteur·rices.
Les auteur·rices tiennent à remercier Chloe Loblaw, stagiaire, pour son aide dans la préparation de la présente actualité juridique.