II. Le contrat d’emploi et les normes du travail (employés non syndiqués)
(a) La nature de la relation d’emploi
La notion d’emploi « à volonté » ou « à discrétion »2 n’existe pas au Québec. La relation d’emploi est de nature contractuelle. Elle est régie par les règles générales des contrats ainsi que par les dispositions particulières des contrats d’emploi que l’on retrouve dans le Code civil. De plus, bon nombre de lois ont une incidence sur la relation d’emploi.
En général, il n’est pas nécessaire que le contrat d’emploi, comme la plupart des contrats de droit civil, soit fait par écrit. Il n’y a pas d’exigences pour les manuels ou les politiques. Toutefois, si de tels manuels ou de telles politiques étaient remis aux employés, ces documents constitueraient vraisemblablement une confirmation de certaines (ou de la totalité) des modalités du contrat d’emploi et auraient force exécutoire. À défaut d’éliminer ces manuels ou politiques, il est possible de minimiser les risques associés à leur utilisation en incorporant un énoncé tel que : « Ce manuel ou manuel de politiques contient des lignes directrices qui peuvent être modifiées par la Société ». Il est recommandé, dans la mesure du possible, de donner un préavis « raisonnable » du changement avant qu’une modification unilatérale ne prenne effet.
Il y a une obligation tacite d’agir de bonne foi et de traiter équitablement avec les tiers, dans toutes les questions touchant le droit du travail. Le Code civil crée une présomption de bonne foi; la partie qui allègue la mauvaise foi a le fardeau de la preuve.
(b) La durée du contrat d’emploi
Un contrat de travail peut être d’une durée fixe ou indéterminée, mais non perpétuelle. Le fait que le contrat soit ou non d’une durée déterminée aura une incidence sur les règles applicables à sa résiliation, comme nous le verrons plus loin.
(c) Le contenu du contrat d’emploi et des normes du travail
La règle générale est celle de la liberté contractuelle. Toutefois, les salariés temporaires et permanents, syndiqués ou non syndiqués du Québec jouissent de droits minimums de base garantis par la Loi sur les normes du travail (LNT)3, dont les dispositions sont « d’ordre public », c’est-à-dire qu’aucune entente (y compris une convention collective) ne peut déroger à la LNT, à moins qu’une telle dérogation ne soit expressément permise par la LNT. Toutefois, comme les exigences imposées par la LNT sont un minimum prévu par la loi, un contrat de travail individuel ou une convention collective peut accorder à un employé de meilleures conditions de travail que les normes prévues dans la LNT.
La LNT traite du salaire, de la durée du travail, des repos, des jours fériés payés, des congés annuels ainsi que des congés pour événements familiaux, de maternité et parentaux, et elle accorde aussi divers recours aux personnes salariées. La LNT prévoit également que des taux de salaire différents fondés uniquement sur le statut d’emploi des personnes salariées sont interdits, tout comme, en ce qui concerne les régimes de retraite ou d’autres avantages sociaux des employés, un traitement différentiel fondé uniquement sur la date d’embauche des employés. Voici les faits saillants des principales dispositions.
(i) La rémunération
Le salaire minimum au Québec est actuellement de 15,75 $ l’heure. Il change habituellement en mai de chaque année, à quelques exceptions près. Pour les employés qui reçoivent des pourboires, le salaire minimum est actuellement de 12,60 $ l’heure.
Il convient également de noter que la LNT interdit les différences de traitement fondées uniquement sur la date d’embauche d’employés exécutant les mêmes tâches dans le même établissement. De plus, une personne salariée ne peut recevoir un taux de salaire inférieur à celui consenti aux autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement uniquement parce que la personne salariée travaille moins d’heures par semaine. La LNT donne à tous les employés la possibilité de porter plainte devant la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail du Québec, la CNESST, au sujet de différences de traitement interdites.
(ii) L’âge minimal d’emploi
Sous réserve de certaines exceptions, l’âge minimum pour travailler au Québec est de 14 ans. De plus, il est interdit de faire travailler un enfant assujetti à l’obligation de fréquentation scolaire
4:
- durant les heures de classe (article 84.4 LNT)
- la nuit entre 23 h et 6 h (article 84.6 LNT) (article 84.6 LNT)5
- plus de 17 heures par semaine et plus de 10 heures du lundi au vendredi.
(iii) La durée du travail
La semaine de travail normale est actuellement de 40 heures. Les heures supplémentaires (article 52 LNT), rémunérées à taux et demi (article 55 LNT), doivent être payées lorsqu’une personne travaille au-delà des heures de la semaine normale de travail. Un employeur peut, avec le consentement écrit de l’employé et selon certaines conditions, étaler les heures de travail de l’employé en question sur une base autre qu’hebdomadaire, à la condition que la moyenne des heures de travail soit équivalente à la norme prévue dans la LNT ou les règlements y afférents. Un tel horaire est également possible si l’étalement des heures est prévu dans une convention collective ou un décret (article 53 LNT).
Dans certaines circonstances, le paiement des heures supplémentaires peut être remplacé par un congé payé d’une durée équivalente aux heures supplémentaires effectuées, majorées de 50 % (article 55 LNT). Les cadres d’entreprise n’ont pas droit au paiement d’heures supplémentaires (paragraphe 3 de l’article 54, LNT). D’autres catégories visées par cette exception sont aussi énumérées à l’article 54.
Bien que la durée de la semaine de travail ne soit pas plafonnée, une personne salariée a droit à un repos hebdomadaire d’une durée minimale de 32 heures consécutives (article 78, LNT).
Une personne salariée peut refuser de travailler plus de deux heures au-delà de ses heures habituelles quotidiennes, plus de 14 heures de travail par période de 24 heures ou, si la personne salariée n’a pas été informée cinq jours à l’avance qu’elle serait tenue de travailler, sous réserve de certaines exceptions. Sous réserve de l’article 53, LNT (qui traite de l’étalement ou des heures de travail), la personne salariée peut également refuser de travailler plus de 50 heures par semaine (plus de 60 heures par semaine pour une personne salariée qui travaille dans un endroit isolé ou dans la région de la Baie James). Cependant, ce droit de refus ne s’applique pas lorsqu’il y a danger pour la vie, la santé ou la sécurité des travailleuses et des travailleurs ou de la population, en cas de risque de destruction ou de détérioration grave de biens meubles ou immeubles ou d’un autre cas de force majeure, ou si ce refus va à l’encontre du code de déontologie professionnelle de la personne salariée (article 59.0.1, LNT).
En ce qui concerne le repas, l’employeur doit accorder à la personne salariée une période de 30 minutes sans salaire après une période de travail de cinq heures consécutives (article 79, LNT). Cette période doit être rémunérée si la personne salariée n’est pas autorisée à quitter son poste de travail.
(iv) Les congés annuels ou les vacances
Les articles 66 à 77 de la LNT portent sur les vacances. Pendant la période appelée année de référence, la personne salariée acquiert progressivement le droit à un congé annuel devant être pris au cours de l’année suivante. La date de commencement de l’année de référence peut être déterminée par l’employeur. En l’absence de politique de l’employeur à cet égard, la LNT fixe le point de départ de l’année de référence au 1er mai.
Il est désormais possible de prendre une partie ou la totalité du congé annuel pendant l’année de référence, sur demande de la personne salariée, si l’employeur le permet. Pour les personnes salariées absentes pour cause de maladie, d’accident ou pour raisons familiales ou parentales à la fin des 12 mois qui suivent la fin d’une année de référence, il est possible, si l’employeur le permet, de reporter le congé à l’année suivante à la demande de la personne salariée. Dans le cas d’une personne salariée qui est absent, à défaut de reporter le congé, l’employeur doit dès lors verser l’indemnité afférente au congé annuel à laquelle la personne salariée a droit.
L’employeur choisit la période de vacances et doit donner à la personne salariée un préavis d’au moins quatre semaines quant à la date de début du congé. Sauf disposition contraire de la loi, d’une convention collective ou d’un décret, il est interdit à un employeur de remplacer le congé annuel par une indemnité compensatoire.
La date de référence sert à calculer la durée du congé annuel auquel la personne salariée a droit. Selon le nombre d’années de service continu dont il justifie à cette date, la personne salariée a droit à deux ou trois semaines de vacances payées (deux semaines de vacances après un an de service continu et trois semaines de vacances après trois ans de service continu). La paie de vacances annuelles de la personne salariée ayant droit à deux semaines de vacances est égale à 4 % de son salaire brut durant l’année de référence; elle est égale à 6 % si elle a droit à trois semaines de vacances. On trouve la définition de « service continu » au paragraphe 12 de l’article 1 : la durée ininterrompue pendant laquelle la personne salariée est liée à l’employeur par un contrat de travail, même si l’exécution du travail a été interrompue sans qu’il y ait résiliation du contrat, dans le cas par exemple de congés autorisés et de mises à pied. Le service continu comprend aussi la période pendant laquelle la personne salariée travaille pour l’employeur aux termes de contrats successifs à durée déterminée, sans rupture de la relation de travail, bien qu’il puisse survenir une interruption entre la fin d’un contrat à durée déterminée et le début du contrat suivant.
La personne salariée ayant droit à deux semaines de vacances peut également demander un congé additionnel non payé de la durée nécessaire pour étendre la durée de son congé annuel à trois semaines.
Les personnes salariées à temps partiel ont également droit à une période de vacances dont la durée est égale à celle des personnes salariées à temps plein justifiant du même nombre d’années de service continu. La durée de leur période de vacances sera la même que celle des personnes salariées à temps plein ayant le même nombre d’années de service continu. Toutefois, leur paie de vacances, qui est calculée en fonction de leur salaire brut, est bien sûr moins élevée.
Des dispositions spéciales régissent la paie de vacances de la personne salariée qui est absente pour cause de maladie ou d’accident ou qui est en congé de maternité ou de paternité durant l’année de référence. Ces dispositions prévoient, en gros, que la paie de vacances ne doit pas être réduite du fait d’une absence attribuable aux motifs susmentionnés.
(v) Les jours fériés, chômés et payés
L’article 60 de la LNT énumère les sept jours fériés suivants, qui sont chômés et payés s’ils coïncident avec un jour normalement ouvrable pour la personne salariée :
- le 1er janvier;
- le vendredi saint ou le lundi de Pâques, au choix de l’employeur;
- le lundi qui précède le 25 mai;
- le 1er juillet ou, si la fête du Canada tombe un dimanche, le 2 juillet;
- le premier lundi de septembre (ou la fête du Travail);
- le deuxième lundi d’octobre (ou l’Action de grâce);
- le 25 décembre.
De plus, la Loi sur la fête nationale prévoit que le 24 juin est un jour férié, chômé et payé. La fête nationale du 24 juin, tout comme la fête de l’indépendance aux États-Unis (Independance Day), doit être célébrée le jour où elle tombe. Des dispositions particulières s’appliquent aux salariés qui doivent travailler ces jours.
(vi) Le congé pour examen médical relié à la grossesse (article 81.3 LNT)
Les employées ont droit à autant de jours sans salaire que cela est nécessaire.
(vii) Le congé de maternité (articles 81.4 à 81.17 LNT)
L’employée enceinte a droit à un congé non payé d’une durée maximale de 18 semaines consécutives. Toutefois, durant cette période, la salariée a droit à des prestations d’assurance parentale pendant au plus 18 semaines (voir la rubrique « Prestations d’assurance-emploi » pour plus de détails).
La LNT contient une série de dispositions assez détaillées sur les droits et obligations de l’employeur pendant et après ces périodes d’absence. La salariée qui s’est prévalue d’un congé de maternité doit être remise dans la même situation que si elle n’avait pas pris le congé. Par exemple, si son emploi aurait normalement pris fin en raison d’une restructuration, l’employeur peut résilier son contrat de travail. Toutefois, l’employeur ne peut résilier simplement le contrat de travail de la salariée en congé de maternité parce qu’il préfère celui ou celle qui l’a remplacée pendant cette période. La loi interdit ce genre de pratique, entre autres.
viii) Le congé de paternité / congé du parent qui n’a pas donné naissance à l’enfant (articles 81.2 et 81.2.1 LNT)
À la naissance de son enfant, y compris un enfant né dans le cadre d’un projet parental impliquant une grossesse pour autrui, la personne salariée a droit à un congé de paternité (ou à un congé du parent qui n’a pas donné naissance à l’enfant) d’au plus cinq semaines continues, sans salaire. La personne salariée qui adopte un enfant a droit au même congé. Durant cette période, la personne salariée a droit à des prestations d’assurance parentale pendant au plus cinq semaines (voir la rubrique « Prestations d’assurance-emploi » pour plus de détails).
Un préavis écrit de trois semaines indiquant la date prévue du congé et du retour au travail doit être donné à l’employeur. Toutefois, l’avis peut être plus court si la naissance de l’enfant survient avant la date prévue.
(ix) Le congé pour naissance ou adoption (article 81.1 LNT)
Une personne salariée peut s’absenter du travail pendant cinq journées, à l’occasion de la naissance de son enfant, y compris dans le cadre d’un projet de grossesse pour autrui, ou de l’adoption d’un enfant ou lorsque survient une interruption de grossesse à compter de la 20e semaine de grossesse. Les deux premières journées sont rémunérées. Le congé peut être divisé en jours à la demande de l’employé et ne peut être pris plus de 15 jours après l’arrivée de l’enfant à la maison ou après l’interruption de grossesse (voir la rubrique « Prestations d’assurance-emploi » pour plus de détails).
(x) Le congé parental (articles 81.10 et suivants LNT)
Le congé parental prévoit un congé sans salaire d’une durée maximale de 65 semaines consécutives, pris par le père ou la mère au plus tard 85 semaines suivant la naissance du nouveau-né ou, dans le cas d’une adoption ou d’un enfant né dans le cadre d’un projet de grossesse pour autrui, 85 semaines après la date où l’enfant a été confié à la personne salariée.
Les prestations d’assurance parentale sont disponibles (voir la rubrique « Prestations d’assurance-emploi » pour plus de détails).
L’article 81.15 LNT prévoit le maintien de la participation aux régimes d’assurance collective et de retraite reconnus au lieu de travail de la personne salariée, sous réserve du paiement régulier des cotisations exigibles relativement à ces régimes et dont l’employeur assume sa part habituelle.
À la fin du congé parental, l’employeur doit réintégrer la personne salariée dans son poste habituel, avec les mêmes, avantages, y compris le salaire auquel elle aurait eu droit si elle était restée au travail. Si le poste habituel n’existe plus à son retour, l’employeur doit lui reconnaître tous les droits et privilèges dont elle aurait bénéficié au moment de la disparition du poste si elle avait alors été au travail. Voir également les articles 79.5 et 79.6 LNT (droits en cas de licenciement ou de mise à pied et avantages).
Un congé de maternité, de paternité ou parental pourra être fractionné en semaines, si l’enfant est hospitalisé, à la demande de l’employé. Le congé de paternité et le congé parental peuvent également être fractionnés en semaines si l’employé y consent.
Si, pendant le congé, l’enfant est hospitalisé, le congé pourra être suspendu et la personne salariée pourra retourner au travail pendant la durée de l’hospitalisation de l’enfant, après entente avec l’employeur. De plus, la personne salariée qui fait parvenir à l’employeur, avant la date d’expiration du congé, un avis accompagné d’un certificat médical attestant que l’état de santé de l’enfant ou, dans le cas d’un congé de maternité, que l’état de santé de la personne salariée l’exige, a droit à une prolongation du congé de la durée indiquée au certificat médical (article 81.14.2 LNT).
(xi) Le congé familial ou parental et absences (articles 79.6.1 et suivants LNT)
L’employé peut s’absenter du travail pendant dix jours par année pour remplir des obligations reliées à la garde, à la santé ou à l’éducation de son enfant ou des membres de sa famille. En ce qui concerne les personnes salariées qui ont trois mois de service continu, les deux premiers jours pris annuellement sont rémunérés selon la formule utilisée pour calculer l’indemnité de jour férié. Ce congé peut être fractionné en journée. La personne salariée doit en aviser l’employeur le plus tôt possible et prendre les moyens raisonnables pour limiter la prise et la durée du congé. Il convient de noter que la notion de « membre de la famille » va bien au-delà des membres habituels de la famille.
Une personne salariée peut s’absenter du travail pendant une période d’au plus 16 semaines sur une période de 12 mois lorsque sa présence est requise auprès d’un membre de sa famille ou d’une personne pour laquelle la personne salariée agit comme proche aidant en raison d’une grave maladie ou d’un grave accident. Lorsque le parent ou la personne est un enfant mineur, la période d’absence n’excède pas 36 semaines sur une période de 12 mois. Le congé peut être prolongé jusqu’à 104 semaines dans le cas d’un enfant mineur de la personne salariée atteint d’une maladie grave, potentiellement mortelle, attestée par un certificat médical.
Une personne salariée peut s’absenter du travail pendant une période d’au plus 27 semaines sur une période de 12 mois lorsque sa présence est requise auprès d’un membre de sa famille, sauf un enfant mineur, ou d’une personne pour laquelle la personne salariée agit comme proche aidant en raison d’une grave maladie possiblement mortelle, attestée par un certificat médical.
La participation de la personne salariée aux régimes d’assurance collective et de retraite reconnus au lieu de travail de la personne salariée doit être maintenue, sous réserve du paiement régulier des cotisations exigibles relativement à ces régimes et dont l’employeur assume sa part habituelle.
À la fin du congé, l’employeur doit réintégrer la personne salariée dans son poste habituel, avec les mêmes avantages, y compris le salaire auquel elle aurait eu droit si elle était restée au travail. Si le poste habituel n’existe plus à son retour, l’employeur doit lui reconnaître tous les droits et privilèges dont elle aurait bénéficié au moment de la disparition du poste si elle avait alors été au travail. La personne salariée conserve les mêmes droits que les personnes salariées licenciées ou mises à pied lorsque l’employeur effectue des licenciements ou des mises à pied qui auraient inclus la personne salariée si elle était demeurée au travail.
(xii) Absences pour cause de maladie, de don d’organes ou de tissus, d’accident (autre qu’une lésion professionnelle au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles), de violence conjugale, de violence à caractère sexuel ou d’acte criminel (articles 79.1 et suivants, LNT)
Une personne salariée a droit à un congé non payé d’une durée maximale de 26 semaines sur une période de 12 mois pour cause de maladie, de don d’organes ou de tissus, d’accident, de violence conjugale, de violence à caractère sexuel ou d’acte criminel. La personne salariée doit aviser l’employeur le plus tôt possible de son absence et des motifs de celle-ci. En ce qui concerne les personnes salariées qui ont trois mois de service continu, les deux premiers jours sont rémunérés. Toutefois, il est à noter que l’employeur n’a pas à rémunérer plus de deux jours d’absence par année au total pour les congés et absences pour obligations familiales ou parentales (articles 79.6.1 et suivants, LNT) et pour les absences en vertu des articles 79.1 et suivants, LNT
La participation de la personne salariée aux régimes d’assurance collective et de retraite reconnus au lieu de travail de la personne salariée doit être maintenue, sous réserve du paiement régulier des cotisations exigibles relativement à ces régimes et dont l’employeur assume sa part habituelle. Les autres avantages dont la personne salariée peut bénéficier pendant la période d’absence seront déterminés par règlement.
À la fin du congé, l’employeur doit réintégrer la personne salariée dans son poste habituel, avec les mêmes, avantages. Si le poste habituel n’existe plus à son retour, l’employeur doit lui reconnaître tous les droits et privilèges dont elle aurait bénéficié au moment de la disparition du poste si elle avait alors été au travail.
Ceci n’a pas pour effet d’empêcher un employeur de congédier, de suspendre ou de déplacer une personne salariée si les conséquences de la maladie ou de l’accident ou le caractère répétitif des absences constituent une cause juste et suffisante.
Dans le cas d’un licenciement ou d’une mise à pied, la personne salariée a les mêmes droits que les personnes salariées licenciées ou mises à pied, y compris le retour au travail.
(xiii) Les absences dues à la disparition ou au décès d’un enfant mineur ou d’un membre de la famille (articles 79.10 à 79.11, LNT)
En cas de décès ou de disparition de son enfant mineur, ou en cas de décès par suicide de son conjoint, de son enfant majeur, de son père, de sa mère ou de l’un de ses parents, la personne salariée a droit à un congé sans salaire d’une durée maximale de 104 semaines.
À la fin du congé, la LNT offre la même protection que les employés absents pour cause de maladie, d’accident et de problèmes familiaux ou parentaux et prévoit leur réintégration dans leur ancien poste avec les mêmes avantages.
(xiv) Le congé à l’occasion d’un décès (article 80, LNT)
L’absence pour cause de décès prévoit un maximum de cinq jours (deux jours avec salaire et trois jours sans salaire), applicable à la famille immédiate de l’employé, telle que définie par la LNT. De plus, un employé a droit à un jour de congé, sans salaire, en raison du décès d’autres membres de la famille, tel que défini par l’article 80.1, LNT.
La notion de « conjoint » inclut également les partenaires de même sexe qui vivent ensemble dans une union de fait depuis un an ou plus.
(xv) Le congé de mariage (article 81, LNT)
Une journée sans réduction de salaire est accordée le jour du mariage de la personne salariée.
(xvi) Frais liés au déplacement ou à la formation (article 85.2, LNT)
L’employeur doit rembourser à la personne salariée les frais raisonnables encourus lorsque, sur demande de l’employeur, la personne salariée doit effectuer un déplacement ou suivre une formation.
(d) La résiliation du contrat de travail
Tel que mentionné ci-dessus, les règles de cessation d’emploi varient selon la durée du contrat de travail. Si le contrat de travail est à durée déterminée, l’employeur qui souhaite y mettre fin avant la date de cessation d’emploi sera vraisemblablement tenu de payer la totalité du salaire et des avantages impayés jusqu’à la date d’expiration initiale du contrat.
Si le contrat est à durée indéterminée, ce qui est généralement le cas, il peut être résilié par l’une ou l’autre des parties moyennant un « préavis raisonnable » qui peut être intégré au contrat de travail. Le caractère « raisonnable » du préavis s’évalue au regard de l’interprétation qu’ont fait les tribunaux des dispositions du Code civil et des obligations imposées par la LNT.
Les dispositions pertinentes de la LNT sont les suivantes :
Article 82 LNT
Un employeur doit donner un avis écrit à une personne salariée avant de mettre fin à son contrat de travail ou de le mettre à pied pour six mois ou plus.
Cet avis est d’une semaine si la personne salariée justifie de moins d’un an de service continu, de deux semaines si elle justifie d’un an à cinq ans de service continu, de quatre semaines si elle justifie de cinq à dix ans de service continu et de huit semaines si elle justifie de dix ans ou plus de service continu.
L’avis de cessation d’emploi donné à une personne salariée pendant la période où elle a été mise à pied est nul de nullité absolue, sauf dans le cas d’un emploi dont la durée n’excède habituellement pas six mois à chaque année en raison de l’influence des saisons.
Le présent article n’a pas pour effet de priver une personne salariée d’un droit qui lui est conféré par une autre loi.
Article 83 LNT
L’employeur qui ne donne pas l’avis prévu à l’article 82 ou qui donne un avis d’une durée insuffisante doit verser à la personne salariée une indemnité compensatrice équivalente à son salaire habituel, sans tenir compte des heures supplémentaires, pour une période égale à celle de la durée ou de la durée résiduaire de l’avis auquel il avait droit.
Cette indemnité doit être versée au moment de la cessation d’emploi ou de la mise à pied prévue pour plus de six mois ou à l’expiration d’un délai de six mois d’une mise à pied pour une durée indéterminée ou prévue pour une durée inférieure à six mois mais qui excède ce délai.
L’indemnité de la personne salariée en tout ou en partie rémunérée à commission est établie à partir de la moyenne hebdomadaire de son salaire durant les périodes complètes de paie comprises dans les trois mois précédant sa cessation d’emploi ou sa mise à pied.
Article 2091 Code civil du Québec
Chacune des parties à un contrat à durée indéterminée peut y mettre fin en donnant à l’autre un délai de congé.
Le délai de congé doit être raisonnable et tenir compte, notamment, de la nature de l’emploi, des circonstances particulières dans lesquelles il s’exerce et de la durée de la prestation de travail.
De plus, l’article 83.1 LNT prévoit la possibilité de reporter le paiement de l’indemnité compensatrice à une date ultérieure en ce qui concerne les personnes salariées visées par une convention collective.
NOTE : L’article 82 LNT ne s’applique pas dans certaines circonstances, notamment lorsque le licenciement est pour faute grave. Il existe une exception semblable en vertu du Code civil lorsque le congédiement est motivé par un motif sérieux (article 2094).
Selon la jurisprudence, tous les contrats de travail contiennent une stipulation implicite selon laquelle ils peuvent être résiliés moyennant un « préavis raisonnable ».
La durée de ce préavis varie selon les personnes, ainsi qu’en fonction de plusieurs facteurs dont les plus importants sont les suivants :
- l’âge;
- le niveau de responsabilité et/ou l’échelon hiérarchique;
- le salaire;
- les années de service;
- la possibilité de faire valoir ses compétences et les possibilités de déplacement;
- les circonstances entourant l’embauche de la personne salariée.
D’autres facteurs peuvent aussi être pris en considération dans des cas particuliers. De même, tous n’ont pas la même valeur et ne répondent pas à une formule mathématique.
(e) Les avantages au cours de la période de préavis
En vertu de la LNT, les avantages cessent à la fin de la période de préavis. De plus, l’objectif visé par le « préavis raisonnable » exigé par le Code civil est de mettre la personne salariée dans une situation identique à celle qui aurait été la sienne, n’eût été la cessation de son emploi. Par conséquent, la personne salariée aurait vraisemblablement droit à tous les avantages dont elle aurait bénéficié pendant le délai de préavis, lesquels peuvent comprendre, selon les politiques de l’employeur, les suivants :
- des congés de maladie;
- une allocation d’automobile;
- les cotisations de l’employeur au régime d’assurance collective;
- les cotisations de l’employeur au régime de retraite;
- les primes;
- les commissions;
- les augmentations de salaire qui auraient été accordées pendant le délai de préavis.
(f) Le licenciement collectif (articles 84.0.1 à 84.0.15, LNT)
Un licenciement collectif s’entend d’une cessation du travail, y compris une mise à pied pour une durée de six mois ou plus, qui touche 10 personnes salariées ou plus d’un même établissement au cours d’une période de deux mois consécutifs. Sauf dans le cas d’entreprises à caractère saisonnier ou intermittent, tout employeur qui, pour des raisons d’ordre technologique ou économique, prévoit devoir faire un licenciement collectif, doit en donner avis au ministre de l’Emploi dans les délais minimaux suivants:
- huit semaines, lorsque le nombre de personnes salariées visées par le licenciement est au moins égal à 10 et inférieur à 100;
- 12 semaines, lorsque le nombre de personnes salariées visées par le licenciement est au moins égal à 100 et inférieur à 300;
- 16 semaines, lorsque le nombre de personnes salariées visées par le licenciement est au moins égal à 300.
En cas de force majeure ou lorsqu’un événement imprévu empêche un employeur de respecter les délais d’avis prévus ci-dessus, ce dernier doit donner un avis de licenciement collectif au ministre de l’Emploi aussitôt qu’il est en mesure de le faire.
Les personnes suivantes ne sont pas visées par la disposition de licenciement collectif :
la personne salariée qui ne justifie pas de trois mois de service continu;
la personne salariée dont le contrat pour une durée déterminée ou pour une entreprise déterminée expire;
la personne salariée qui a commis une faute grave;
la personne salariée qui est exclue de l’application de la LNT, comme les cadres supérieurs.
Il est important de mentionner qu’aux fins du calcul du délai approprié, tout l’effectif doit être pris en considération (personnes salariées, personnel de vente, syndiquées ou pas, cadres), sauf celles expressément exclues en vertu de la loi, comme les cadres supérieurs.
Il est interdit de modifier les conditions de travail des personnes salariées durant la période couverte par l’avis au ministre, à moins d’obtenir le consentement écrit de la personne salariée ou de l’association accréditée qui la représente.
L’employeur qui ne respecte pas le délai d’avis (omission de le donner ou insuffisance de l’avis) devra, sauf exception, indemniser la personne salariée, étant entendu que les indemnités en vertu des articles 83 et 84.0.13 de la LNT ne pourront être cumulées (la personne salariée recevra la plus élevée des deux). De plus, le défaut de donner l’avis requis de licenciement collectif sera considéré comme une infraction en vertu de la LNT, et l’employeur sera passible d’une amende de 1 500 $ par semaine ou partie de semaine de défaut ou de retard.
La CNESST peut intenter des poursuites civiles au nom d’une personne salariée pour recouvrer les sommes dues au titre des salaires et des avantages sociaux. Le délai de prescription est d’un an à compter de la date d’échéance de chaque paiement.
L’obligation pour l’employeur de participer à la création d’un comité d’aide au reclassement n’existera que dans les cas où le licenciement collectif touche 50 personnes salariées et plus. Par ailleurs, l’employeur pourra être exempté si des mesures d’aide jugées suffisantes par le ministre sont offertes dans l’établissement visé par le licenciement collectif. La constitution d’un comité d’aide au reclassement et les obligations qui y sont reliées ne s’appliquent donc pas lorsque le nombre de personnes salariées visées par le licenciement est inférieur à 50.
(g) Les recours en vertu de la LNT
Comme il est mentionné ci-dessus, les personnes salariées sont protégées et disposent de certains recours. Les articles sur les recours sont les suivants :
Article 122 LNT
Il est interdit à un employeur ou à son agent de congédier, de suspendre ou de déplacer une personne salariée, d’exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou des représailles ou de lui imposer toute autre sanction :
1) à cause de l’exercice par cette personne salariée d’un droit, autre que celui visé à l’article 84.1, qui lui résulte de la présente loi ou d’un règlement;
1.1) en raison d’une enquête effectuée par la Commission dans un établissement de cet employeur;
2) pour le motif que cette personne salariée a fourni des renseignements à la CNESST ou à l’un de ses représentants sur l’application des normes du travail ou qu’elle a témoigné dans une poursuite s’y rapportant;
2.1) pour le motif que la personne salariée lui a fait un signalement concernant une conduite de harcèlement psychologique commise envers une autre personne ou a collaboré au traitement d’un signalement ou d’une plainte portant sur une telle conduite;
3) pour la raison qu’une saisie en mains tierces a été pratiquée à l’égard de la personne salariée ou peut l’être;
3.1) pour le motif que la personne salariée est un débiteur alimentaire assujetti à la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires (chapitre P-2.2);
4) pour la raison qu’une personne salariée est enceinte;
5) dans le but d’éluder l’application de la présente loi ou d’un règlement;
6) pour le motif que la personne salariée a refusé de travailler au-delà de ses heures habituelles de travail parce que sa présence était nécessaire pour remplir des obligations reliées à la garde, à la santé ou à l’éducation de son enfant ou de l’enfant de son conjoint, ou en raison de l’état de santé d’un membre de la famille [...] ou d’une personne pour laquelle la personne salariée agit comme proche aidant, bien qu’elle ait pris les moyens raisonnables à sa disposition pour assumer autrement ces obligations;
7) en raison d’une dénonciation faite par une personne salariée d’un acte répréhensible au sens de la Loi concernant la lutte contre la corruption (chapitre L-6.1) ou de sa collaboration à une vérification ou à une enquête portant sur un tel acte ou un tel manquement; [...]
En ce qui concerne le paragraphe 4 ci-dessus, un employeur doit, de son propre chef, déplacer une salariée enceinte si les conditions de travail de cette dernière comportent des dangers physiques pour elle ou pour l’enfant à naître. La salariée peut refuser ce déplacement sur présentation d’un certificat médical attestant que ces conditions de travail ne présentent pas les dangers allégués.
Article 123 LNT
Une personne salariée qui croit avoir été victime d’une pratique interdite en vertu de l’article 122 et qui désire faire valoir ses droits doit le faire auprès de la CNESST dans les 45 jours de la pratique dont elle se plaint. Si la plainte est soumise dans ce délai au Tribunal administratif du travail, le défaut de l’avoir soumise à la CNESST ne peut être opposé à la plaignante.
Article 124 LNT
La personne salariée qui justifie de deux ans de service continu dans une même entreprise et qui croit avoir été congédiée sans une cause juste et suffisante peut soumettre sa plainte par écrit à la CNESST ou la mettre à la poste à l’adresse de la CNESST dans les 45 jours de son congédiement, sauf si une procédure de réparation, autre que le recours en dommages-intérêts, est prévue ailleurs dans la présente loi, dans une autre loi ou dans une convention.
Si la plainte est soumise dans ce délai au Tribunal, le défaut de l’avoir soumise à la CNESST ne peut être opposé au plaignant.
Ce dernier article ne s’applique pas aux personnes salariées syndiquées qui peuvent déposer un grief, car il s’agit d’une « procédure de réparation » au sens de l’article 124 LNT. En vertu de l’article 128 LNT, une personne salariée peut demander d’être réintégrée dans son emploi.
Les personnes salariées non syndiquées régies par la LNT peuvent se faire représenter sans frais par les avocats de la CNESST relativement à des pratiques interdites et des congédiements injustes.
(h) Le harcèlement psychologique et le harcèlement sexuel (articles 81.18 à 81.20 et 123.6 à 123.16, LNT)
On entend par « harcèlement psychologique et harcèlement sexuel » une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique de la personne salariée et qui entraîne, pour celle-ci, un milieu de travail néfaste (article 81.18, LNT). Pour plus de précision, le harcèlement psychologique comprend une telle conduite lorsqu’elle se manifeste par de telles paroles, de tels actes ou de tels gestes à caractère sexuel. Il convient de mentionner qu’une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte atteinte et produit un effet nocif continu pour la personne salariée.
En vertu de la LNT, toute personne salariée a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique (article 81.19). L’employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu’une telle conduite est portée à sa connaissance, pour la faire cesser. Il doit notamment adopter et rendre disponible à ses personnes salariées une politique de prévention du harcèlement psychologique et de traitement des plaintes, incluant entre autres un volet concernant les conduites qui se manifestent par des paroles, des actes ou des gestes à caractère sexuel.
Il est très important que chaque employeur vérifie s’il a des politiques ou des lignes directrices à cet égard. Si aucune telle politique ou ligne directrice n’est en place, elles doivent être adoptées pour remplir cette obligation.
À compter du 27 septembre 2024, la politique de l’employeur doit inclure les éléments prévus à la LNT.
Plusieurs dispositions de la LNT sur le harcèlement psychologique sont par ailleurs réputées faire partie intégrante de toute convention collective. La personne salariée visée par une telle convention doit exercer les recours qui y sont prévus, dans la mesure où de tels recours existent à son égard. Avant le délibéré, une demande conjointe des parties à une telle convention peut être présentée au ministre en vue de nommer un médiateur.
La personne salariée qui croit avoir été victime de harcèlement psychologique ou sexuel peut adresser, par écrit, une plainte à la CNESST. Une telle plainte peut aussi être adressée, pour le compte d’un ou de plusieurs personnes salariées qui y consentent par écrit, par un organisme sans but lucratif (OSBL) de défense des droits des personnes salariées.
Toute plainte doit être déposée dans les deux ans de la dernière manifestation de cette conduite.
À la réception d’une plainte, la CNESST fait enquête avec diligence selon les règles énoncées aux articles 103 à 110 LNT, en y faisant les adaptations nécessaires.
En cas de refus de la CNESST de donner suite à la plainte, la personne salariée ou, le cas échéant, l’OSBL, peut, dans les 30 jours de la décision, demander par écrit à la CNESST de déférer sa plainte au Tribunal.
La CNESST pourra, au cours de l’enquête et avec l’accord des parties, demander au ministre de nommer un médiateur. La CNESST peut, sur demande de la personne salariée, l’assister et la conseiller pendant la médiation.
Si la personne salariée est encore liée à l’employeur par un contrat de travail, elle est réputée au travail pendant les séances de médiation.
Si aucun règlement n’intervient entre les parties concernées et si la CNESST accepte de donner suite à la plainte, elle la défère sans délai au Tribunal.
La CNESST peut représenter une personne salariée devant le Tribunal.
Si le Tribunal juge que la personne salariée a été victime de harcèlement psychologique ou sexuel et que l’employeur a fait défaut de respecter ses obligations, il peut rendre toute décision qui lui paraît juste et raisonnable (par exemple, la réintégration de la personne salariée, des indemnités monétaires variées, le financement pour le soutien psychologique, sauf pour une période au cours de laquelle la personne salariée est victime d’une lésion professionnelle, au sens de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, qui résulte du harcèlement psychologique).
IV. Vente d’une entreprise et droits et obligations de l’ayant cause (articles 96 et 97 LNT)
Le concept de la continuité d’entreprise existe au Québec lorsqu’une vente d’entreprise a lieu. En ce qui concerne les personnes salariées non syndiquées, la LNT et le Code civil traitent d’une telle situation.
Dans ce contexte, deux articles de la LNT sont très importants.
La LNT prévoit ce qui suit dans le cas d’une vente d’entreprise :
96. L’aliénation ou la concession totale ou partielle d’une entreprise n’invalide aucune réclamation civile qui découle de l’application de la présente loi ou d’un règlement et qui n’est pas payée au moment de cette aliénation ou concession. L’ancien employeur et le nouveau sont liés solidairement à l’égard d’une telle réclamation.
97. L’aliénation ou la concession totale ou partielle de l’entreprise, la modification de sa structure juridique, notamment, par fusion, division ou autrement n’affecte pas la continuité de l’application des normes du travail.
Il est également intéressant de souligner que le Code civil contient une disposition quelque peu similaire :
2097. L’aliénation de l’entreprise ou la modification de sa structure juridique par fusion ou autrement, ne met pas fin au contrat de travail.
Ce contrat lie l’ayant cause de l’employeur.
Le Code du travail contient des dispositions similaires relativement aux personnes salariées syndiquées (articles 45 et 46) :
45. L’aliénation ou la concession totale ou partielle d’une entreprise n’invalide aucune accréditation accordée en vertu du présent code, aucune convention collective, ni aucune procédure en vue de l’obtention d’une accréditation ou de la conclusion ou de l’exécution d’une convention collective.
Sans égard à la division, à la fusion ou au changement de structure juridique de l’entreprise, le nouvel employeur est lié par l’accréditation ou la convention collective comme s’il y était nommé et devient par le fait même partie à toute procédure s’y rapportant, aux lieu et place de l’employeur précédent.
Le deuxième alinéa ne s’applique pas dans un cas de concession partielle d’entreprise lorsque la concession n’a pas pour effet de transférer au concessionnaire, en plus de fonctions ou d’un droit d’exploitation, la plupart des autres éléments caractéristiques de la partie d’entreprise visée.
45.2. Dans le cas d’une concession partielle d’une entreprise, les règles suivantes s’appliquent :
(1) la convention collective visée au deuxième alinéa de l’article 45 qui n’est pas expirée lors de la prise d’effet de la concession est réputée expirer, aux fins des relations du travail entre le nouvel employeur et l’association de salariés concernée, le jour de cette prise d’effet;
2) le nouvel employeur n’est pas lié par l’accréditation ou la convention collective lorsqu’une entente particulière portant sur cette concession comporte une clause à l’effet que les parties renoncent à l’application du deuxième alinéa de l’article 45. Une telle clause lie le Tribunal mais n’affecte pas la portée, chez l’employeur cédant, de l’accréditation de l’association de salariés signataires.
Le paragraphe 1 du premier alinéa ne s’applique pas dans le cas d’une concession partielle d’entreprise entre employeurs des secteurs public et parapublic au sens du paragraphe 1 de l’article 111.2.
46. Il appartient au Tribunal, sur requête d’une partie intéressée, de trancher toute question relative à l’application des articles 45 à 45.3. À cette fin, il peut notamment en déterminer l’applicabilité.
Il peut aussi, sur requête d’une partie intéressée, régler toute difficulté découlant de l’application de ces articles et de leurs effets de la façon qu’il estime la plus appropriée. À cette fin, il peut notamment rendre toute décision nécessaire à la mise en œuvre d’une entente entre les parties intéressées sur la description des unités de négociation et sur la désignation d’une association pour représenter le groupe de salariés visé par l’unité de négociation décrite à cette entente ou sur toute autre question d’intérêt commun.
À cette même fin et lorsque plusieurs associations de salariés sont mises en présence par l’application des articles 45 et 45.3, le Tribunal peut également :
(1)accorder ou modifier une accréditation;
2) accréditer l’association de salariés qui groupe la majorité absolue des salariés ou procéder à un scrutin secret suivant les dispositions de l’article 37 et accréditer conséquemment l’association qui a obtenu le plus grand nombre de voix conformément aux dispositions de l’article 37.1;
3) décrire ou modifier une unité de négociation;
4) fusionner des unités de négociation et, lorsque plusieurs conventions collectives s’appliquent aux salariés du nouvel employeur compris dans une unité de négociation résultant de cette fusion, déterminer la convention collective qui demeure en vigueur et apporter aux dispositions de celle-ci toute modification ou adaptation qu’elle juge nécessaire.
La fusion d’unités de négociation emporte la fusion, s’il en est, des listes d’ancienneté des salariés qu’elles visaient, selon les règles d’intégration des salariés déterminées par le Tribunal.
Lorsqu’une concession d’entreprise survient durant la procédure en vue de l’obtention d’une accréditation, le Tribunal peut décider que l’employeur cédant et le concessionnaire sont successivement liés par l’accréditation.
Le Tribunal peut aussi, sur requête d’une partie intéressée déposée au plus tard le trentième jour suivant la prise d’effet d’une concession partielle d’entreprise et lorsqu’il juge que cette concession a été faite dans le but principal d’entraver la formation d’une association de salariés ou de porter atteinte au maintien de l’intégralité d’une association de salariés accréditée :
i) écarter l’application, le cas échéant, du troisième alinéa de l’article 45 et rendre toute décision appropriée pour favoriser l’application du deuxième alinéa du même article;
ii) écarter l’application du paragraphe 1° du premier alinéa de l’article 45.2 et déterminer que le nouvel employeur demeure lié, jusqu’à la date prévue de son expiration, par la convention collective visée au deuxième alinéa de l’article 45.
Le délai prescrit pour demander au Tribunal de se prononcer sur l’applicabilité de l’article 45 est de neuf mois, tel qu’il est établi par la jurisprudence; mais dans les 30 jours suivant la date de prise d’effet d’une concession d’entreprise, si une partie juge que cette concession a été faite dans le but principal d’entraver la formation d’une association de salariés ou de porter atteinte au maintien de l’intégralité d’une association de salariés accréditée.
En vertu du paragraphe 1 du premier alinéa de l’article 45.2, dans le cas d’une concession partielle d’une entreprise, la convention collective visée au deuxième alinéa de l’article 45 qui n’est pas expirée lors de la prise d’effet de la concession est réputée expirer, aux fins des relations du travail entre le nouvel employeur et l’association de salariés concernée, le jour de cette prise d’effet. Cette règle ne s’applique pas dans le cas d’une concession entre employeurs des secteurs public et parapublic.
À la demande d’une partie intéressée, le Tribunal peut, lorsqu’il juge que cette concession a été faite dans le but principal d’entraver la formation d’une association de salariés ou de porter atteinte au maintien de l’intégralité d’une association de salariés accréditée, selon le cas, écarter l’application du troisième alinéa de l’article 45 et l’application du paragraphe 1 du premier alinéa de l’article 45.2.
Dans le cas d’une telle concession partielle d’une entreprise, les parties peuvent aussi décider que l’article 45 ne s’appliquera pas, et cette décision liera le Tribunal. Toutefois, la clause n’affecte pas la portée, chez l’employeur cédant, de l’accréditation de l’association de salariés signataires (alinéa 2 de l’article 45.2).
Le Code du travail contient également des dispositions similaires relativement aux situations qui se produisent lorsqu’une entreprise, dont les relations du travail étaient jusqu’alors régies par le Code canadien du travail, passe sous la compétence législative du Québec (article 45.3) :
45.3. Lorsqu’une entreprise, dont les relations du travail étaient jusqu’alors régies par le Code canadien du travail (Lois révisées du Canada (1985), chapitre L-2), passe, en ce domaine, sous la compétence législative du Québec, les dispositions suivantes s’appliquent :
1) une accréditation accordée, une convention collective conclue par un syndicat accrédité ainsi qu’une procédure engagée en vertu du Code canadien du travail en vue de l’obtention d’une accréditation ou de la conclusion ou de l’exécution d’une convention collective sont réputées être une accréditation accordée, une convention collective conclue et déposée et une procédure engagée en vertu du présent code;
2) l’employeur demeure lié par l’accréditation ou la convention collective, ou encore, dans les circonstances où le deuxième alinéa de l’article 45 aurait été applicable si l’entreprise avait alors été de la compétence législative du Québec, le nouvel employeur devient lié par l’accréditation ou la convention collective comme s’il y était nommé et il devient par le fait même partie à toute procédure s’y rapportant, aux lieux et place de l’employeur précédent;
3) les procédures alors en cours en vue de l’obtention d’une accréditation ou de la conclusion ou de l’exécution d’une convention collective sont continuées et décidées suivant les dispositions du présent code, compte tenu des adaptations nécessaires;
4) les dispositions du troisième alinéa de l’article 45 ou de l’article 45.2, selon le cas, s’appliquent lorsque le passage résulte d’une concession partielle d’entreprise.
Il devient donc très important pour un acheteur de bien comprendre toutes les conditions de travail avant de présenter une offre d’achat.
Voir aussi la rubrique X « Loi sur l’équité salariale » du présent document concernant les conséquences de l’aliénation d’une entreprise sur les obligations relatives à l’ajustement salarial prévues dans la Loi sur l’équité salariale.
VI. Le régime de santé et de sécurité du travail du Québec
Le régime de santé et de sécurité du travail du Québec est le résultat d’un large consensus. Le Québec s’est doté de lois énonçant les droits et obligations de l’ensemble de ses travailleuses, travailleurs et employeurs et établissant les modalités et conditions de leur application. Il s’agit de la Loi sur la santé et la sécurité du travail8 (LSST), qui traite de prévention, et de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnellesi9 (LATMP), qui prévoit la réparation et la réadaptation des travailleuses et des travailleurs.
Ces lois rendent les travailleuses, les travailleurs et les employeurs responsables de la santé et de la sécurité au travail. À cet effet, la CNESST est chargée de l’application de ces lois.
Le processus de contestation des décisions rendues en vertu de la LATMP et de la LSST est soumis à la division santé et sécurité du travail du Tribunal, qui est chargée d’entendre et de trancher les contestations des décisions rendues par la CNESST après une révision administrative. Il y a aussi une procédure pour l’évaluation médicale d’une travailleuse ou d’un travailleur qui a subi une lésion professionnelle.
a) Santé et sécurité du travail
La LSST et ses nombreux règlements traitent des droits et obligations de l’employeur et de ses employés en matière de santé et de sécurité, prévoient la création de comités de santé et de sécurité, la nomination de représentants de la sécurité et l’élaboration d’un programme de santé et de prévention. De plus, il prévoit des inspections et crée divers recours, infractions et sanctions.
La personne salariée a les droits généraux suivants :
9. Le travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité physique et psychique.
10. Le travailleur a notamment le droit conformément à la présente loi et aux règlements :
(1) à des services de formation, d’information et de conseil en matière de santé et de sécurité du travail, particulièrement en relation avec son travail et son milieu de travail, et de recevoir la formation, l’entraînement et la supervision appropriés;
2) de bénéficier de services de santé préventifs et curatifs en fonction des risques auxquels il peut être exposé et de recevoir son salaire pendant qu’il se soumet à un examen de santé en cours d’emploi exigé pour l’application de la présente loi et des règlements.
De plus, l’article 12 prévoit le droit de refuser d’exécuter un travail dans certaines situations :
12. Un travailleur a le droit de refuser d’exécuter un travail s’il a des motifs raisonnables de croire que l’exécution de ce travail l’expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ou psychique ou peut avoir l’effet d’exposer une autre personne à un semblable danger.
Des dispositions permettent à la personne salariée de demander un retrait préventif si elle est exposée à un contaminant qui présente un danger (article 32). La même protection est accordée à la travailleuse enceinte en vertu de l’article 40 de la loi, qui se lit comme suit :
40. Une travailleuse enceinte qui fournit à l’employeur le certificat […] qui atteste que les conditions de son travail comportent des dangers physiques pour l’enfant à naître ou, à cause de son état de grossesse, pour elle-même, peut demander d’être affectée à des tâches ne comportant pas de tels dangers et qu’elle est raisonnablement en mesure d’accomplir.
En ce qui concerne l’indemnité pour la travailleuse enceinte, l’article 42.1 prévoit ce qui suit :
42.1. Une travailleuse n’est pas indemnisée en vertu des articles 40, 41 et 42 à compter de la quatrième semaine précédant celle de la date prévue pour l’accouchement, telle qu’inscrite dans le certificat visé à l’article 40, si elle est admissible aux prestations payables en vertu de la Loi sur l’assurance parentale (chapitre A-29.011). La travailleuse est présumée y être admissible dès ce moment.
Toutefois, la date prévue pour l’accouchement peut être modifiée lorsque la Commission est informée par le professionnel qui effectue le suivi de grossesse, au plus tard quatre semaines avant la date prévue au certificat mentionné au premier alinéa, d’une nouvelle date prévue pour l’accouchement.
Bien que la LSST soit exhaustive, son effet se fait surtout sentir dans les milieux industriels.
a) b) Réparation des travailleuses et des travailleurs
La LATMP définit son objet comme suit à l’article 1 :
1. La présente loi a pour objet la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elles entraînent pour les bénéficiaires.
Le processus de réparation des lésions professionnelles comprend la fourniture des soins nécessaires à la consolidation d’une lésion, la réadaptation physique, sociale et professionnelle du travailleur victime d’une lésion, le paiement d’indemnités de remplacement du revenu, d’indemnités pour préjudice corporel et, le cas échéant, d’indemnités de décès.
La présente loi confère en outre, dans les limites prévues au chapitre VII, le droit au retour au travail du travailleur victime d’une lésion professionnelle.
La LATMP crée un système de responsabilité « sans égard à la faute » pour une « lésion professionnelle » et une « maladie professionnelle » au sens de la loi.
La loi prévoit divers recours pour les employés et les employeurs, notamment une procédure d’évaluation médicale. En fin de compte, toutes les réclamations sont traitées par la division santé et sécurité du travail du Tribunal.
Le paiement des prestations prévues par la LATMP ainsi que les frais d’administration de ce régime d’assurance sans égard à la faute sont financés au moyen de primes ou de cotisations payées exclusivement par l’ensemble des employeurs du Québec en fonction de l’un des trois modes de tarification de la province.
i) La tarification au taux de l’unité : pour la petite entreprise
Ce mode de tarification s’applique aux employeurs dont la prime annuelle totale est inférieure à environ 9 000 $. La prime est calculée à partir du taux de chaque unité dans laquelle les activités de l’employeur sont classées et par tranche de 100 $ de la masse salariale assurable.
Les employeurs au taux de l’unité sont tarifés de façon collective : lorsqu’un accident se produit, ce sont tous les employeurs classés dans la même unité qui en supportent les coûts. En 2021, environ 73 % ont été tarifés selon ce mode.
ii) La tarification au taux personnalisé : pour la moyenne et la grande entreprise
Ce mode de tarification s’applique aux employeurs dont la prime annuelle totale se situe, entre 9 000 $ et 450 000 $ (ces montants sont approximatifs puisque les « seuils d’admissibilité » varient d’une année à l’autre).
La prime est calculée à partir d’un taux personnalisé. Autrement dit, le taux de l’unité ou des unités dans laquelle ou lesquelles l’employeur a été classé est ajusté (c’est-à-dire personnalisé) pour tenir compte de l’importance du coût des indemnisations imputé au dossier de l’employeur, en fonction de sa performance par rapport à tous les employeurs classés dans cette unité. De cette façon la CNESST peut récompenser l’employeur des efforts investis pour prévenir les lésions professionnelles, le succès des mesures prises pour contrôler et gérer les lésions et favoriser la réhabilitation ou le retour au travail du travailleur qui a subi la lésion.
En 2024, environ 26 % des employeurs assurés ont été tarifés selon ce mode.
iii) Mutuelles
Il s’agit d’une variation du mode de tarification au taux personnalisé selon lequel la CNESST permet aux entreprises de plus petite taille (et, par conséquent, moins personnalisé) d’avoir la possibilité de former une mutuelle de prévention afin d’obtenir une tarification plus personnalisée et ainsi générer de meilleurs rendements afin d’obtenir une performance positive au titre des indemnisations. Les employeurs membres d’une mutuelle sont tarifés collectivement selon le mode au taux personnalisé qui tient compte de leurs résultats communs en matière de santé et de sécurité du travail, mesurés en fonction de leurs coûts d’indemnisation collectifs.
iv) La tarification rétrospective : pour la très grande entreprise
Ce mode de tarification s’applique aux employeurs de très grande taille dont la cotisation annuelle est supérieure à environ 450 000 $. En 2024, environ 1 % des employeurs assurés ont été tarifés selon ce mode.
La tarification au taux personnalisé d’un employeur au cours d’une année donnée (fondée sur les indemnisations et les coûts passés) sera ajustée après deux ans puis quatre ans de façon à tenir compte de la performance au titre des indemnisations de cette année-là (quatre ans de coûts par année de lésion). L’employeur se verra rembourser les coûts de réclamation moins élevés que prévu ou une cotisation additionnelle sera imposée pour couvrir les coûts de réclamation plus élevés que prévu.
v) Bonne gestion de la santé et de la sécurité = prime moins élevée
Québec offre aux employeurs de nombreux modes de tarification pour leur permettre de réduire leurs cotisations se rapportant à l’indemnisation des accidents du travail en prévenant les accidents du travail et les maladies professionnelles et en contrôlant et en assurant la gestion des réclamations que les activités de prévention ne pourraient pas éliminer.