Le 13 juin, l’Assemblée nationale du Québec a adopté le projet de loi 141 intitulé Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières (Loi) qui vise à moderniser l’encadrement du secteur financier afin de permettre aux institutions financières de s’adapter à l’évolution du marché et aux nouveaux besoins de la clientèle, tout en offrant une meilleure protection du consommateur.1 Cette loi omnibus, qui a fait l’objet d’une vive polémique dans le milieu de la finance au cours des derniers mois et dont le libellé final vient tout juste d’être rendu disponible, entend notamment adapter la Loi sur la distribution de produits et services financiers2 (LDPSF) aux nouvelles pratiques relatives à la distribution de produits et de services financiers en ligne.3
L’adoption et l’entrée en vigueur de la Loi constituent sans nul doute une avancée importante dans l’évolution du secteur InsurTech au Québec en fixant les assises règlementaires sur lesquelles cette industrie pourra s’appuyer et qui l’aidera à se développer dans les prochaines années au Québec. « InsurTech » est un terme inspiré du mouvement « FinTech » qui désigne l’ensemble des modèles d’affaires innovants qui proposent une nouvelle expérience client en appliquant des technologies novatrices dans le secteur de l’assurance.
En effet, en vertu du nouveau cadre règlementaire mis en place par la Loi, les assureurs pourront distribuer certains produits d’assurance sans l’intervention d’un représentant,4 à compter du 13 juin 2019,5 ce qui consolide les assises de la vente d’assurance en ligne. Pour ce faire, un assureur devra toutefois respecter certains paramètres.
Tout d’abord, il devra s’assurer que l’un de ses représentants en assurance certifiés par l’Autorité des marchés financiers (AMF) est disponible afin de pouvoir agir, en temps utile, auprès des clients qui en expriment le besoin.6
Il doit également informer la clientèle de l’opportunité de recourir à un tel service.7
De plus, l’assureur devra veiller à ce que le consommateur qui transige en ligne dispose de tous les renseignements qui lui sont nécessaires à une prise de décision éclairée et à l’exécution du contrat d’assurance.8 Parmi les renseignements devant être ainsi communiqués par l’assureur se retrouvent notamment l’étendue de la garantie considérée et quelles en sont les exclusions, les délais à l’intérieur desquels un sinistre doit être déclaré ainsi que ceux à l’intérieur desquels l’assureur est tenu de payer les sommes assurées ou l’indemnité prévue et l’information nécessaire à la communication à l’assureur d’une plainte devant être consignée au registre des plaintes créé par la Loi,9 y compris le délai à l’intérieur duquel une telle plainte doit être communiquée.10
Ce nouvel encadrement règlementaire se veut donc flexible de manière à s’adapter au fil de l’évolution de la technologie, des pratiques du marché, des besoins et des préoccupations des consommateurs.11 Il fournit aux assureurs une souplesse législative nécessaire à la modernisation de leur offre de produits d’assurance. Ceux-ci seront à même d’innover, dans leurs modes de distribution et leurs produits, de façon à adapter leur modèle d’affaires aux habitudes de consommation numériques de la clientèle, et d’améliorer globalement l’expérience client.
Les acteurs de l’industrie souhaitant miser sur cette ouverture législative peuvent s’inspirer du Royaume-Uni où l’InsurTech est en plein essor comme en témoignent les sommes considérables investies par d’importants joueurs de l’industrie de l’assurance dans la modernisation de leurs services.12 Chez plusieurs entreprises britanniques en démarrage, l’assurance du futur est chose d’aujourd’hui : gestion automatisée des polices d’assurance, capteurs intelligents pour l’assurance habitation, robot-conseiller et microassurance sur demande sont autant d’exemples qui illustrent comment l’InsurTech révolutionne déjà le secteur.13
Enfin, il importe de souligner que la Loi confère également le pouvoir à l’AMF d’édicter des lignes directrices destinées à tous les assureurs ou à une catégorie d’entre eux.14 Il sera intéressant d’examiner dans quelle mesure l’AMF exercera ce pouvoir vis-à-vis la distribution de produits d’assurance en ligne et il est raisonnable de croire que celle-ci fixera des paramètres additionnels dans l’exercice de sa mission de protection du public. Tout porte à croire que nous en saurons davantage à ce sujet d’ici le 13 juin 2019, date d’entrée en vigueur des dispositions de la Loi.
Notes