Les employeurs sous réglementation fédérale pourraient être bientôt tenus de revoir et probablement d’augmenter le taux de salaire versé aux employés à temps partiel de même qu’aux employés saisonniers ou occasionnels en vertu des nouvelles règles sur l’« égalité de traitement ». Les agences de placement temporaire sous réglementation fédérale pourraient être particulièrement touchées par ces nouvelles règles. Celles-ci s’occupent de placer des personnes dans des emplois temporaires pour leurs clients.

Le gouvernement fédéral met actuellement au point les règlements visant la mise en œuvre de ces règles sur l’égalité de traitement et invite le public à transmettre des commentaires sur le projet de règlement d’ici le 24 mars 2025. Le gouvernement prévoit que les modifications proposées entreront en vigueur par décret de la gouverneure en conseil vers la fin de 2025 ou au début de 2026.


Enjeux : Égalité de traitement 

La Loi no 2 d’exécution du budget de 2018 (projet de loi C 86) a introduit de nouvelles dispositions dans le Code canadien du travail (Code) dont le but est d’assurer l’égalité de traitement. Ces dispositions ne sont pas encore en vigueur. 

Selon les règles sur l’égalité du traitement, il est interdit à un employeur de payer des taux de salaire différents à des employés selon leurs « situations d’emploi » lorsque :

  • Ces employés exécutent un travail qui est essentiellement le même;
  • Les exigences sont essentiellement les mêmes sur le plan des compétences, de l’effort et des responsabilités;
  • Le travail est exécuté dans des conditions de travail essentiellement les mêmes; et 
  • Ces employés travaillent dans le même établissement.

Essentiellement, l’égalité de traitement exige que les employés qui exécutent un travail comparable touchent des taux de salaire comparables, sous réserve de quelques exceptions. À cette fin, le projet de loi C-86 prévoit également que les agences de placement temporaire sous réglementation fédérale ne peuvent pas payer à leurs employés un taux de salaire moindre que celui payé par le client à ses propres employés pour un travail qui est essentiellement le même dans des conditions de travail essentiellement les mêmes. 

En vertu des règles prévues par le projet de loi C-86, les employeurs ne sont pas autorisés à réduire le taux de salaire d’un employé pour se conformer à l’exigence relative à l’égalité de traitement. Cependant, une différence entre les taux de salaire attribuable à l’ancienneté, au mérite, à la quantité ou à la qualité de la production du travail d’un employé ou tout autre critère prévu par règlement est permise. 

Le projet de loi C-86 instaure également un mécanisme permettant à un employé de demander une révision de son taux de salaire. Dans les 90 jours suivant la réception de la demande, l’employeur doit procéder à l’examen et donner à l’employé une réponse écrite soit indiquant qu’il augmente le taux de salaire, soit expliquant les raisons pourquoi le taux de salaire actuel est conforme.   

Modifications proposées au Règlement du Canada sur les normes du travail (RCNT)

Plusieurs définitions et règles clés du projet de loi C-86 devront être clarifiées dans des dispositions réglementaires futures. Le gouvernement fédéral fait actuellement des propositions de modifications au RCNT afin d’apporter ces précisions. Les révisions qui devront être apportées au RCNT sont les suivantes :

  • Nouvelles définitions : Les termes suivants seront définis aux fins de l’application des dispositions relatives à l’égalité de traitement et aux agences de placement temporaire seulement :
    • Le terme « établissement » ferait référence au lieu physique ou général où le travail est effectué. Deux lieux de travail ou plus exploités par un même employeur seraient considérés comme faisant partie du même établissement s’ils sont situés dans la même région d’assurance-emploi telles qu’elles sont définies au Règlement sur l’assurance-emploi. Seul le salaire des employés qui travaillent dans le même établissement peut être comparé aux fins des dispositions relatives à l’égalité de traitement.
    • Le terme « situation d’emploi » inclurait les différences entre les travailleurs à temps plein et à temps partiel, ainsi qu’entre les employés temporaires (par exemple les employés nommés pour une période déterminée, occasionnels, saisonniers ou sur appel) et les employés permanents. Ces changements préciseraient que les différences dans le nombre d’heures travaillées par semaine et la durée de l’emploi seront considérées comme faisant partie de la situation d’emploi.
    • Les définitions des termes « temps plein » et « temps partiel » seraient ajoutées au RCNT. Afin d’éliminer toute confusion quant au nombre d’heures travaillées par semaine considérées comme un emploi à temps plein, ces définitions seraient établies conformément à la classification de Statistique Canada du nombre d’heures équivalant à un emploi à temps plein. 
  • Calcul des taux de salaire : Seuls des taux de salaire de même type peuvent être comparés (par exemple taux horaire, taux de commission, taux kilométrique) pour déterminer si l’égalité de traitement est respectée. Les employeurs pourraient aussi comparer la rémunération pour les services supplémentaires, comme le salaire lié aux heures supplémentaires, au fait d’être sur appel, au rappel au travail, et au travail ou aux déplacements pendant un jour non ouvrable. 
  • Exceptions supplémentaires relatives à l’égalité de traitement : Les dispositions relatives à l’égalité de traitement et aux agences de placement temporaire autorisent déjà les différences de taux de salaire attribuables à l’ancienneté, au mérite, à la quantité ou à la qualité de la production du travail d’un employé. Les modifications proposées ajouteraient d’autres exceptions à l’application des dispositions relatives à l’égalité de traitement, comme :
    • Le « blocage de poste », une pratique selon laquelle le taux de salaire d’un employé est maintenu même après la mutation de ce dernier à un poste qui est rémunéré à un taux inférieur;
    • L’augmentation des taux de salaire en raison de la difficulté à recruter ou à maintenir en poste des employés lors d’une pénurie de main d’œuvre;
    • Les primes du Nord liées aux régions géographiques et aux lieux exposés à des difficultés;
    • Les indemnités de déplacement pour les employés en déplacement; et
    • La rémunération des employés dans le cadre d’un programme de perfectionnement ou de formation. 
  • Exigences en matière de tenue des registres : Les employeurs sont obligés de conserver la demande de révision écrite faite par l’employé et la réponse de l’employeur ainsi que de tenir un registre de tout système mis en place pour justifier le paiement de taux de salaire différents. Les agences de placement temporaire sont également tenues de conserver un registre indiquant tout client auprès duquel un employé travaille dans le cadre d’une affectation de même que les dates de début et de fin de l’affectation. 
  • Avis : Les employeurs devront mettre à jour leurs avis relativement aux normes du travail pour tenir compte des nouvelles dispositions relatives à l’égalité de traitement et aux agences de placement temporaire.
  • Les sanctions administratives pécuniaires seraient revues afin que certaines actions soient désignées comme des violations des dispositions relatives à l’égalité de traitement et afin de déterminer le montant de la sanction de base applicable. Par exemple, il serait interdit à un employeur de verser à un employé un taux de salaire inférieur à celui d’un autre employé en raison d’une différence dans sa situation d’emploi (par exemple temps plein et temps partiel).

À retenir

Les modifications proposées pourraient imposer davantage d’obligations aux employeurs qui exploitent plusieurs établissements et emploient des personnes ayant différentes situations d’emploi (employés nommés pour une période déterminée, occasionnels, sur appel ou permanents). Par ailleurs, les employeurs qui paient leurs employés différemment en raison des exceptions citées ci dessus, comme la pratique du blocage de poste, pourraient être moins touchés. Les employeurs peuvent encore présenter des commentaires sur ces propositions de règles d’ici le 24 mars 2025. Restez à l’affût des nouvelles à ce sujet, y compris de la date d’entrée en vigueur de ces changements. 

L’auteur tient à remercier Valerie Li, stagiaire, pour son aide dans la préparation de la présente actualité juridique.



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