Le projet de loi 195 met fin à la situation d’urgence déclarée en Ontario, ce qui a un impact considérable sur les congés spéciaux, les mises à pied temporaires et les congédiements implicites en vertu de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi (LNE).

Comme il en est fait mention dans notre actualité juridique du 31 juillet dernier, le projet de loi 195 a reçu la sanction royale le 21 juillet et est entré en vigueur le 24 juillet, édictant la Loi de 2020 sur la réouverture de l’Ontario (mesures adaptables en réponse à la COVID-19). En plus des changements décrits dans notre édition précédente, son adoption marque également la fin de la situation d’urgence déclarée liée à la COVID-19 et la révocation du Règlement de l’Ontario 50/20 : Déclaration de situation d’urgence en date du 24 juillet. Voici d’autres aspects découlant du projet de loi 195 sur lesquels les employeurs devraient se pencher.

Congés spéciaux

En mars 2020, la LNE a été modifiée afin d’inclure, entre autres, deux types de congé spécial se rapportant aux situations d’urgence déclarées et aux situations d’urgence liées à une maladie infectieuse, respectivement. Comme on le verra ci-dessous, la fin de la situation d’urgence déclarée liée à la COVID-19 influe différemment sur chaque type de congé.

Congé pour situation d’urgence déclarée (CSUD)

Le congé pour situation d’urgence déclarée (CSUD) donne à l’employé le droit de prendre un congé non payé s’il n’exercera pas les fonctions de son poste en raison d’une situation d’urgence déclarée en vertu de l’article 7.0.1 de la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence (LPCGSU) et i) en raison d’un décret s’appliquant à lui pris en vertu de l’article 7.0.2 de la LPCGSU, ii) en raison d’un ordre s’appliquant à lui donné en vertu de la Loi sur la protection et la promotion de la santé, iii) parce qu’il doit fournir des soins ou de l’aide à un particulier précisé dans la Loi, ou iv) pour tout autre motif prescrit. Comme le droit à un CSUD doit être lié à une situation d’urgence déclarée, la fin de la situation d’urgence déclarée liée à la COVID-19 signifie aussi que ce droit a pris fin le 24 juillet.

La seule exception prévue à la LNE vise les employés qui se sont prévalus d’un CSUD en raison d’une situation d’urgence qui a pris fin ou a été rejetée et en raison d’un décret, d’un arrêté ou d’une ordonnance pris en vertu du paragraphe 7.0.2 (4) de la LPCGSU et prorogé en vertu du paragraphe 7.0.8 (4) de cette loi. Dans un tel cas, le droit de l’employé au congé « est maintenu pendant le délai de prorogation si ce dernier n’exerçait pas les fonctions de son poste du fait du décret, de l’arrêté ou de l’ordonnance ». Toutefois, comme il est expliqué plus en détail ci-dessous, les employeurs doivent prendre note que lorsqu’ils envisagent d’obliger les employés qui étaient en CSUD à retourner au travail, ils doivent tenir compte de tout chevauchement entre un CSUD et un congé spécial en raison d’une maladie infectieuse (CSRMI), puisque certains employés pourraient remplir les critères du CSRMI avec protection de l’emploi.

Congé spécial en raison d’une maladie infectieuse (CSRMI) 

Le congé spécial en raison d’une maladie infectieuse (CSRMI) prévu par la LNE donne à l’employé le droit de prendre un congé non payé s’il n’exercera pas les fonctions de son poste pour un ou plusieurs motifs énumérés ci-dessous liés à une maladie infectieuse désignée. Puisque le Règlement de l’Ontario 228/20 : Congé spécial en raison d’une maladie infectieuse (le Règlement) a désigné le coronavirus (COVID-19) comme maladie infectieuse en vertu de la LNE, les employés ont le droit à un CSRMI en raison de la COVID-19. 

Plus précisément, la LNE prévoit qu’un employé a le droit de prendre un CSRMI s’il n’exercera pas les fonctions de son poste en raison de l’un ou de plusieurs des motifs suivants liés à cette maladie infectieuse désignée :

  • L’employé fait personnellement l’objet d’une enquête médicale, de surveillance médicale ou de soins médicaux liés à une maladie infectieuse désignée.
  • L’employé agit conformément à un ordre ou à une ordonnance prévu à l’article 22 ou 35 de la Loi sur la protection et la promotion de la santé en lien avec la maladie infectieuse désignée. 
  • L’employé est en quarantaine ou en isolement ou fait l’objet d’une mesure de lutte, notamment l’auto-isolement, et la quarantaine, l’isolement ou la mesure de lutte a été mis en place conformément à des renseignements ou à des directives liés à la maladie infectieuse désignée qu’un fonctionnaire de la santé publique, un praticien de la santé qualifié, Télésanté Ontario, le gouvernement de l’Ontario, le gouvernement du Canada, un conseil municipal ou un conseil de santé a donnés au public, en tout ou en partie, ou à un ou à plusieurs particuliers par voie imprimée, électronique, radiodiffusée ou autre.
  • L’employé a reçu une directive donnée par son employeur parce que ce dernier craint que l’employé expose d’autres particuliers à la maladie infectieuse désignée dans son lieu de travail.
  • L’employé fournit des soins ou un soutien à un particulier visé au paragraphe (8) en raison d’une question liée à la maladie infectieuse désignée qui concerne ce particulier, notamment la fermeture d’une école ou d’une garderie.
  • L’employé est directement touché par des restrictions en matière de déplacement liées à la maladie infectieuse désignée et, compte tenu des circonstances, on ne peut pas raisonnablement s’attendre à ce qu’il revienne en Ontario.
  • Tout autre motif prescrit.

Tant que la COVID-19 demeure une maladie infectieuse désignée en vertu de la LNE et qu’il remplit l’un ou plusieurs des critères susmentionnés, l’employé admissible continue d’avoir droit au CSRMI.

CSRMI réputé

Comme il a été signalé initialement dans notre actualité juridique du 5 juin dernier, le Règlement prescrivait également un nouveau motif pour lequel des employés seraient réputés être en CSRMI, soit s’ils n’exerçaient pas les fonctions de leur poste car leurs heures de travail étaient temporairement réduites ou éliminées pour des motifs liés à la COVID-19 pendant la période de la COVID-19. Il est important de souligner que cela signifie que les employés peuvent être en un tel CSRMI réputé que « pendant la période de la COVID-19 ». 

Le Règlement définit la « période de la COVID-19 » comme commençant le 1er mars 2020 et prenant fin à la date qui tombe six semaines après le jour où la situation d’urgence déclarée prend fin ou est rejetée. La situation d’urgence déclarée ayant pris fin le 24 juillet, la période de la COVID-19 prévue par le Règlement prendra fin le 4 septembre 2020. En conséquence, les employés n’auront plus droit à ce CSRMI réputé après le 4 septembre 2020. 

Mises à pied temporaires

Le Règlement a également apporté des changements dans les dispositions de la LNE en matière de mise à pied temporaire. En effet, comme il a été souligné dans notre actualité juridique du 5 juin dernier, le Règlement prévoit que les employés dont les heures de travail sont temporairement réduites ou éliminées, ou dont le salaire a été temporairement réduit, pour des motifs liés à la maladie infectieuse désignée pendant la période de la COVID-19 « ne sont désormais plus considérés comme étant mis à pied temporairement aux termes des articles 56 (détermine ce qui constitue un licenciement) et 63 (détermine ce qui constitue une cessation d’emploi) de la LNE ».

Dans ce cas-ci également, puisque cette disposition est liée à la durée de la « période de la COVID-19 », elle expirera le 4 septembre 2020. Ainsi, les restrictions normales relatives aux mises à pied temporaires devraient être de nouveau en vigueur après le 4 septembre 2020. 

Congédiement implicite

En ce qui a trait au congédiement implicite, le Règlement prévoit également qu’une réduction ou une élimination temporaire des heures de travail d’un employé, ou une réduction temporaire du salaire d’un employé, pour des motifs liés à la maladie infectieuse désignée ne constitue pas un congédiement implicite en vertu de la LNE si elle a eu lieu pendant la période de la COVID-19. 

La période de la COVID-19 expirant le 4 septembre 2020, les employeurs devront de nouveau examiner si la réduction ou l’élimination des heures de travail ou la réduction du salaire d’un employé qui se produit après cette date pourrait constituer un congédiement implicite aux termes de la LNE. Notons aussi que le Règlement ne vise pas la manière dont les tribunaux appliquent la doctrine du congédiement implicite en common law, distincte de celle de la LNE. 

En outre, le Règlement stipule que les plaintes déposées auprès du ministère du Travail alléguant que la réduction ou l’élimination temporaire des heures de travail ou la réduction temporaire du salaire d’un employé par un employeur constitue un licenciement ou une cessation de l’emploi seraient réputées ne pas avoir été déposées si certaines conditions sont remplies. 

Comme il est énoncé dans notre actualité juridique du 5 juin dernier, une de ces conditions est que la réduction ou l’élimination temporaire des heures de travail, ou la réduction temporaire du salaire, doit avoir eu lieu pendant la période de la COVID-19. La période de la COVID-19 prévue au Règlement prenant fin le 4 septembre 2020, de telles plaintes déposées à l’égard d’une réduction ou d’une élimination temporaire des heures de travail, ou d’une réduction temporaire du salaire, se produisant après le 4 septembre 2020 devraient, dans le cours normal, être acceptées par le ministère telles qu’elles sont déposées.

À retenir

En résumé, les employeurs doivent se préparer en vue des éléments suivants :

  • CSUD : En date du 24 juillet 2020, plusieurs employés en CSUD ne sont plus admissibles à ce congé.
  • CSRMI : À l’heure actuelle et jusqu’à ce que la COVID-19 ne soit plus désignée en tant que maladie infectieuse en vertu de la LNE, les employés admissibles en CSRMI continuent d’avoir droit à ce congé.
  • CSRMI réputé : Après le 4 septembre 2020, les employés en CSRMI réputé cesseront d’être en congé réputé.
  • Mises à pied : Après le 4 septembre 2020, la suspension temporaire des dispositions normales en matière de mise à pied de la LNE devrait prendre fin. Cela signifie que bien qu’il sera possible de mettre à pied des employés, les employeurs doivent tout de même être au fait des périodes de mise à pied permises en vertu de la LNE. À cette fin, il convient de noter qu’en vertu de la LNE, les employés qui ne sont pas rappelés pendant la période de mise à pied permise ont généralement droit à toutes les indemnités de cessation d’emploi, notamment le préavis, l’indemnité de départ prévue par la loi (le cas échéant) et le maintien des avantages sociaux. Comme certains employeurs le savent bien, il peut s’agir d’un exercice très coûteux.
  • Congédiement implicite en vertu de la LNE : Après le 4 septembre 2020, on peut s’attendre à ce que le ministère recommence à accepter les réclamations pour congédiement implicite en vertu de la LNE, même si elles se rapportent à une réduction ou à une élimination temporaire des heures de travail d’un employé, ou à une réduction temporaire du salaire d’un employé, pour des motifs liés à la maladie infectieuse désignée. Par conséquent, les employeurs doivent garder à l’esprit que la réduction du salaire ou des heures de travail peut, dans certaines circonstances, donner naissance au risque de réclamations pour congédiement implicite en vertu de la LNE.

Pour les employeurs, l’importance de ces autres aspects découlant du projet de loi 195 ne peut être sous-estimée. Bien que le gouvernement ait offert des allègements considérables aux employeurs et aux employés aux termes du Règlement, il semble que ceux-ci tirent à leur fin. Améliorer la communication et fournir aux employés touchés des lignes directrices claires sur la manière dont leur emploi sera géré dans les semaines à venir seront par conséquent des mesures très importantes pour les équipes de direction et des ressources humaines en Ontario. 

Les auteurs désirent remercier Rebecca Brown, étudiante, pour son aide dans la préparation de cette actualité juridique. 



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