Le 28 mars 2024, la Cour suprême du Canada a accordé une permission d’appel à l’égard de deux décisions rendues par la Cour d’appel du Québec dans les affaires i) Opsis Services aéroportuaires inc. c. Procureur général du Québec et ii) Services maritimes Québec inc. c. Procureur général du Québec. Ces deux affaires soulèvent d’importantes questions à propos de l’obligation pour une entreprise qui offre des services à un client dont les activités relèvent de la compétence exclusive du Parlement fédéral (comme les ports ou les aéroports) de détenir un permis délivré par les autorités provinciales.
Dans l’affaire Opsis Services aéroportuaires inc., le Procureur général du Québec prétendait qu’une entreprise exploitant un centre de répartition des appels d’urgence à l’aéroport international Pierre-Elliot-Trudeau devait détenir un permis délivré par le Bureau de la sécurité privée (BSP) conformément aux dispositions de la Loi sur la sécurité privée (LSP) adoptée par l’Assemblée nationale du Québec. Dans l’affaire Services maritimes Québec inc., le Procureur général du Québec prétendait également qu’un employé d’une entreprise effectuant des opérations de chargement sur des navires transatlantiques, et dont la tâche était de contrôler l’accès aux installations portuaires, devait détenir un permis délivré par le BSP en vertu de la LSP. De leur côté, les entreprises défenderesses soutenaient essentiellement qu’elles n’étaient pas soumises à l’application de la LSP puisque la sécurité des ports et des aéroports relevait de la compétence exclusive du Parlement fédéral.
La Cour d’appel a appliqué le principe du fédéralisme coopératif afin de conclure que, bien que la sécurité des ports et des aéroports relève effectivement de la compétence exclusive du Parlement fédéral, la simple obligation de détenir un permis conformément aux dispositions de la LSP ne constitue pas une « entrave grave et importante » à cette compétence. Selon la Cour d’appel, les dispositions de la LSP visent simplement à contrôler la probité des détenteurs de permis et non à contrôler la qualité de leur travail ou encore la manière dont ils exercent leurs activités.
La décision de la Cour suprême à ce sujet est très attendue puisque de nombreuses lois provinciales – et règlements municipaux – dans l’ensemble du Canada prévoient l’obligation pour les entreprises désirant effectuer certaines activités ou procéder à certains travaux de détenir un permis, et que l’obtention et la détention de ce permis sont habituellement accompagnées de diverses conditions et obligations susceptibles d’avoir une incidence importante sur les activités relevant de la compétence exclusive du Parlement fédéral. La décision de la Cour suprême aura un impact direct sur les nombreuses entreprises canadiennes offrant des services à des clients œuvrant dans des domaines d’activités relevant de la compétence exclusive du Parlement fédéral.