La pandémie de COVID-19 a eu des répercussions importantes sur les milieux de travail partout dans le monde. Ici, au Canada, les employeurs ont dû s’adapter à une vitesse record à une réglementation en évolution et ajuster leurs effectifs alors que la demande visant leurs produits ou leurs services fluctuait de façon drastique. En conséquence, plusieurs employeurs ont dû réduire les effectifs et procéder à des congédiements sans motif valable.

À la même époque l’an dernier, plusieurs se demandaient comment les circonstances économiques sans précédent découlant de la pandémie influeraient sur les préavis raisonnables accordés aux employés congédiés pendant la pandémie. Une année plus tard, alors que des causes concernant des employés congédiés sont parvenues devant les tribunaux, il semble que la réponse est évidente : la pandémie peut être un facteur à prendre en compte dans l’établissement du préavis raisonnable, mais pas à l’exclusion d’autres facteurs, et seulement dans la mesure où elle existait en tant que facteur au moment du congédiement.

Cette actualité se penche sur la mesure dans laquelle la pandémie de COVID-19 a influé sur les preneurs de décision dans l’établissement de préavis raisonnables appropriés dans le cadre de congédiements injustifiés. 


Les préavis peuvent être plus longs pour les employés congédiés pendant la pandémie

Au Canada, un employé a droit à un préavis de cessation d’emploi raisonnable, à moins de stipulation contraire dans un contrat d’emploi valide. La durée appropriée d’un préavis raisonnable dépend des circonstances, notamment l’âge de l’employé, ses années de service, la nature de son poste et la disponibilité d’un emploi similaire.

Avant la pandémie, les tribunaux avaient clairement indiqué déjà que les « facteurs économiques » dans le marché ou dans un secteur ou domaine particulier qui rendent la tâche difficile pour un employé congédié de se trouver un autre emploi peuvent justifier un préavis plus long. Sur ce fondement, plusieurs employés, et plus particulièrement leurs conseillers juridiques, ont fait valoir que la pandémie a donné lieu à une réalité économique justifiant l’imposition d’un préavis plus long.

Bien qu’un tribunal ne se soit pas encore clairement prononcé sur le fait que la pandémie justifie un préavis plus long, certaines décisions ont laissé entendre une volonté de la prendre en compte en tant que facteur pour allonger les préavis. Les tribunaux n’ont cependant pas encore invoqué la COVID-19 pour justifier l’imposition de préavis qui sont d’une durée disproportionnée ou autrement en dehors des limites du caractère raisonnable.

Dans l’affaire Iriotakis v Peninsula Employment Services Limited, pour évaluer le préavis approprié, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a souligné que la pandémie était susceptible d’avoir des répercussions négatives sur la recherche d’emploi du plaignant et a conclu que les parties auraient dû raisonnablement s’attendre à ce qu’elle ait de telles répercussions lorsqu’il a été mis fin à son emploi à la fin mars 2020. Toutefois, bien que la COVID-19 eût été un facteur dans l’évaluation du préavis, la cour ne l’a pas prise en compte à l’exclusion de tous les autres facteurs, recommandant plutôt une approche équilibrée qui prenait en compte tous les facteurs pertinents.

Bien qu’il semble évident que les tribunaux sont disposés à considérer la pandémie comme un facteur dans l’évaluation des préavis raisonnables, ils ne le feront que lorsqu’il sera justifié de le faire selon les circonstances de l’affaire. Plus particulièrement, des tribunaux ont refusé de prendre en compte la pandémie en tant que facteur pour établir un préavis raisonnable lorsque la cessation d’emploi a eu lieu avant la pandémie.

Dans l’affaire Yee v Hudson’s Bay Company, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a examiné le cas d’un employé de la direction congédié en août 2019, avant la pandémie. Le plaignant faisait valoir que la conjoncture économique causée par la pandémie compliquait la tâche de trouver un nouvel emploi et justifiait par conséquent l’imposition d’un préavis plus long. La cour a réfuté cet argument, soutenant en définitive que le préavis approprié doit être établi selon les circonstances qui existaient au moment de la cessation d’emploi.

La Cour supérieure de justice de l’Ontario est parvenue à une décision similaire dans l’affaire Nahum v Honeycomb Hospitality Inc., où la cour n’a pas tenu compte des effets de la pandémie puisque l’employée avait été congédiée avant le début de celle-ci. Bien que la pandémie fût susceptible d’avoir influé sur la recherche d’emploi de l’employée (et par conséquent, sur ses efforts d’atténuation), comme il s’agissait d’un facteur qui ne pouvait pas avoir été prévu au moment de la cessation d’emploi, la cour ne l’a pas incluse dans son analyse du préavis raisonnable.

Ainsi, le ralentissement économique engendré par la pandémie ne sera pris en compte pour évaluer les préavis raisonnables que lorsqu’elle était raisonnablement prévisible par les parties au moment de la cessation d’emploi. Sinon, elle ne peut être prise en compte que pour évaluer les efforts d’atténuation, puisque les tribunaux ont conclu que la pandémie constitue un facteur susceptible de rendre la recherche d’emploi plus difficile. 

À retenir

  • La pandémie de COVID-19 est susceptible de toucher, et même d’allonger, les préavis accordés aux employés congédiés pendant la pandémie. La pandémie ne sera toutefois pas prise en compte à l’exclusion d’autres facteurs ni n’est susceptible de justifier l’imposition d’un préavis d’une durée disproportionnée. 
  • La jurisprudence à ce jour indique que la pandémie n’est pas susceptible d’être considérée comme un facteur pour évaluer le préavis d’employés dont il a été mis fin à l’emploi avant la pandémie. Dans de tels cas, la pandémie peut être considérée comme un facteur pour évaluer le caractère raisonnable des efforts d’atténuation d’un employé. 


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