Des modifications à la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) portant sur l’élection des administrateurs et les propositions d’actionnaire entreront en vigueur cet été. Elles constituent le plus récent volet d’une série de modifications apportées à la LCSA à voir le jour au cours des dernières années.
Entrée en vigueur des modifications de la LCSA
Le 31 août 2022 marquera l’entrée en vigueur des modifications suivantes apportées à la LCSA :
Élections annuelles par un vote distinct pour chacun des candidats
Les administrateurs de sociétés ouvertes régies par la LCSA devront être élus par vote individuel chaque année. À l’heure actuelle, la LCSA permet aux administrateurs d’être élus en tant que partie d’une liste de candidats et pour un mandat d’au plus trois ans. La TSX exige déjà la tenue d’élections annuelles et de votes individuels plutôt que par liste de candidats. Or, les modifications donneront lieu à un changement pour certains émetteurs cotés à la TSXV et à la CSE, puisque ces bourses permettent les élections échelonnées et le vote par liste tant que les actionnaires acceptent ces modalités.
Vote majoritaire pour les administrateurs dans le cadre d’élections sans opposition
Lorsqu’il n’y a qu’un seul candidat par poste d’administrateur à combler au conseil, les actionnaires seront en mesure de voter « en faveur » ou « contre » chaque candidat au poste d’administrateur (plutôt que de voter « en faveur » ou de « s’abstenir » de voter selon le régime actuel), et chaque candidat à un poste d’administrateur devra recevoir la majorité des voix exprimées en sa faveur pour être élu. De plus, si un candidat à un poste d’administrateur ne reçoit pas une majorité des voix en sa faveur, il ne pourra être nommé en tant qu’administrateur par le conseil avant la prochaine assemblée annuelle des actionnaires, sauf si cette nomination est nécessaire pour faire en sorte que le conseil compte le nombre requis d’administrateurs qui sont des résidents canadiens ou indépendants.
Aux termes des exigences actuelles de la TSX, un administrateur est tenu de présenter sa démission s’il ne reçoit pas la majorité des voix exprimées en sa faveur, mais le conseil a la latitude voulue pour ne pas accepter cette démission dans des « circonstances exceptionnelles ». Les modifications suppriment ce pouvoir discrétionnaire du conseil. Les modifications toucheront également bon nombre d’émetteurs cotés à la TSXV et à la CSE, puisque ceux-ci ne sont pas tenus actuellement de suivre une politique de vote majoritaire.
Il convient de souligner que si un administrateur en poste n’obtient pas la majorité des voix en sa faveur à l’assemblée des actionnaires, cet administrateur pourra continuer à siéger comme administrateur pendant une période de transition d’au plus 90 jours suivant l’assemblée.
Propositions d’actionnaire
Les modifications et le projet de réglementation changent le délai à l’intérieur duquel un actionnaire peut présenter des propositions à une société régie par la LCSA, établissant une période qui commence 150 jours avant l’expiration d’un an à compter de la dernière assemblée annuelle des actionnaires et se termine 90 jours avant (plutôt qu’une date butoir qui tombe 90 jours avant l’expiration d’un an à compter de la date de l’avis de convocation à la dernière assemblée annuelle). Ce changement donnera une idée plus précise de la date butoir et permettra aux actionnaires de présenter des propositions plus près de la date de l’assemblée annuelle. Les sociétés qui choisissent d’indiquer dans leur circulaire actuelle la date butoir fixée pour soumettre une proposition l’année prochaine devraient tenir compte de ce changement au moment de finaliser les circulaires se rapportant aux assemblées de 2022.
Modifications apportées à la LCSA qui ne sont pas encore entrées en vigueur
D’autres modifications de la LCSA, lesquelles portent sur la gouvernance et la communication avec les actionnaires, ne sont toujours pas en vigueur et nous estimons qu’elles n’entreront pas en vigueur avant encore au moins un an.
- Mécanisme de notification et d’accès. Le mécanisme de notification et d’accès permet à une société de mettre à la disposition des actionnaires certains documents relatifs à l’assemblée des actionnaires en ligne plutôt que de les envoyer par la poste. Bien que la législation sur les valeurs mobilières ait été modifiée en 2013 pour y prévoir le mécanisme de notification et d’accès, la LCSA n’est pas entièrement compatible avec ces modifications. Par conséquent, les sociétés régies par la LCSA doivent obtenir une dispense pour être en mesure d’utiliser la procédure de notification et d’accès. Les modifications permettront l’utilisation complète du mécanisme de notification et d’accès par les sociétés régies par la LCSA.
- Livraison des états financiers. Les sociétés ouvertes satisferont aux exigences quant à l’envoi des états financiers aux actionnaires inscrits et véritables en ayant recours au mécanisme de notification et d’accès. Si une société ouverte n’utilise pas le mécanisme de notification et d’accès (ou à tout le moins pas pour ses états financiers), elle ne devra envoyer les états financiers qu’aux actionnaires inscrits qui lui en font la demande expresse. Jusqu’à ce que les modifications entrent en vigueur, les sociétés ouvertes sont tenues d’envoyer par la poste les états financiers annuels à tous les actionnaires inscrits, sauf à ceux qui déclarent expressément ne pas vouloir les recevoir. Les sociétés souhaitant se prévaloir du mécanisme de notification et d’accès avant l’entrée en vigueur des modifications peuvent présenter une demande de dispense.
- Vote consultatif sur la rémunération. Les sociétés devront concevoir une approche en matière de rémunération des administrateurs et des membres de la haute direction sur laquelle les actionnaires se prononceront annuellement par vote. Les résultats du vote devront être rendus publics, mais ne seront toutefois pas contraignants pour la société. Pour l’heure, nous ne connaissons pas les détails entourant ces exigences, mais nous savons que l’approche globale s’apparentera à celle que suivent les sociétés ayant volontairement adopté un vote consultatif sur la rémunération.
- Renseignements sur le recouvrement des primes d’encouragement. Les sociétés devront présenter dans leur circulaire de sollicitation de procurations annuelle des renseignements sur le recouvrement des primes d’encouragement et des autres avantages liés à la rémunération qui sont versés aux administrateurs et aux membres de la haute direction de la société dans des circonstances (qui restent à définir) où il est établi ultérieurement que les paiements étaient « non mérités ».
- Renseignements relatifs au bien-être. Les sociétés devront présenter dans leur circulaire de sollicitation de procurations annuelle certains renseignements concernant le bien-être des employés, des retraités et des pensionnés. Nous attendons toujours des précisions au sujet de cette nouvelle exigence.
En ce qui concerne les modifications portant sur les mécanismes de notification et d’accès et la livraison des états financiers, Corporations Canada avait fait savoir en mai 2018 qu’il fallait s’attendre à un délai d’environ 18 à 24 mois avant que ces modifications n’entrent pleinement en vigueur. Des retards ont manifestement été accusés, mais nous sommes toujours dans l’attente d’un nouvel échéancier. Les modifications aux dispositions sur la gouvernance ont une plus grande portée, car elles pourraient occasionner des changements d’envergure pour les sociétés, surtout en ce qui a trait aux renseignements relatifs au « bien-être ». Corporations Canada a entrepris un processus de consultation à l’égard de ces modifications au cours du premier trimestre de 2021. Vu l’ampleur potentielle des changements et le fait qu’un projet de règlement se fait toujours attendre, nous ne prévoyons pas que ces modifications entreront en vigueur avant la saison des assemblées des actionnaires de 2024.